Dernière modification:  10/06/2017

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Histoire de l'église de Morlaàs d'après V. Alègre

Morlaàs.

 

En un lieu où peut-être exista d'abord une agglomération gallo-romaine, qui, selon Marca, serait devenue capitale des seigneurs de Béarn, après la destruction de Beneharnum par les Normands, au XI° siècle, Centulle V, vicomte de Béarn, jette, au déclin du XI° siècle, les bases solides « de la souveraineté béarnaise ». Il créa le prieuré Sainte-Foy de Morlaàs et le château vicomtal de la Hourquie où sera établi l'atelier de la fameuse monnaie de Morlaàs. Cette cité (qui a son « for » dès 1101) sera pour deux siècles « le centre de la vie politique, administrative et sociale de l'ancien Béarn ». Le site était particulièrement bien choisi sur les coteaux dominant la vallée du gave, surveillant d'une part la lande de Pont-Long et contrôlant, d'autre part, le Vic-Bilh, sur une route importante qui sera l'une des plus importantes pour les pèlerins de Saint-Jacques-de-Compostelle. Morlaàs, gite détape pour ces derniers comme pour les bergers s'en allant vers le nord, trouva sur place des pierres calcaires pour ses remparts et ses édifices; placée à flanc de coteau, défendue par des fossés, la nouvelle capitale comprenait surtout une grande rue « en bordure de laquelle s'étendait, au nord, le prieuré de Sainte-Foy et ses dépendances, à l'est, le château vicomtal continué par la Hourquie...»

 

ÉGLISE SAINTE-FOY.

 

Historique.

Dès 1074, le pape Grégoire VII avait demandé à Centulle V de répudier Sa femme Gisla, parente à un degré prohibé par l'Eglise ; le vicomte se soumet et, cinq ou six ans plus tard, en expiation, il « consacre à Dieu et à Saint Pierre l'Apôtre une église qu'il fait bâtir... sous le nom de Sainte-Foy, laquelle il dote de plusieurs belles rentes..., et finalement il donne à cette nouvelle église toute la ville de Morlaàs... Il proteste de faire ce don à Dieu et à saint Pierre de Clugni pour sa femme Gisla et son fils Gaston, afin qu'il plaise à Dieu lui pardonner en cette vie et le combler de gloire dans l'autre ». Cette possession de Cluny n'était d'ailleurs pas la première dans Morlaàs où existait déjà un prieuré de cet Ordre ; mais Sainte-Foy se crée au moment de la grande réforme grégorienne où le célèbre abbé Hugues va faire jouer aux Clunisiens un rôle immense dans la chrétienté, et aussi au moment où cette route de Saint-Jacques de-Compostelle ( route de Provence par Toulouse et Auch vers le Somport en empruntant le deuxième chemin vicomtal ) va connaître un intense mouvement.

Le vicomte Gaston IV continue d'ailleurs les générosités de son père envers Sainte-Foy de Morlaàs, et sa belle-fille Guiscarde fera de même.

Sur l'histoire de l'édifice, sa fondation vers 1080, le moyen âge est avare de textes ; il aurait été réparé dès l'aube du XIV° siècle ; son cloître le fut en 1359, enfin, la façade de l'église Sainte-Foy fut modifiée dans le courant du XV° siècle probablement.

Le XVI° siècle fut néfaste à Sainte-Foy. Déjà, en 1520, l'église « ere estade cremade » et surtout, en 1569, dévastée, incendiée, elle connut un désastre irréparable.

Interdite aux catholiques jusqu'en 1620, elle était alors « en praube estat » et le clocher, adossé au gâble, si abîmé que, dès 1612, on songeait à le démolir, s'écroula en 1617. Caubet (d'Asson) et Loustalot (de Nay) refirent alors la charpente. Mais l'église n'en resta pas moins dans un « état déplorable... triste et indécent... » ; l'évêque de Lescar, qui la visite en 1727, constate que l'eau ruisselle dans la nef, que les murailles sont entièrement délabrées, que le quatrième pilier, rongé par l'incendie de 1569, est prêt à s'écrouler. (Il s’écroulera d’ailleurs quelques mois plus tard !), les autres à droite endommagés, un de gauche refait, que le carrelage est ruiné, le mobilier, le vestiaire, le trésor dans un état pitoyable, etc... Il constate que le sanctuaire a une très belle voûte, mais qu'il faut agrandir les fenêtres pour le rendre moins obscur ; mais la nef n'est « ni voûtée ni lambrissée », les chapelles en croix sont « fort belles » ; quant au cloître, il n'en reste que quelques arceaux.

Dès 1734, l'évêque ordonne la réparation du toit, du carrelage, l'achat d'objets sacrés, etc... Trois ans plus tard, l'essentiel est fait  un lambris peint en briques couvre la nef, les murs sont blanchis, le carrelage refait peu après, une chaire neuve placée ; mais, à la veille de la Révolution, la toiture est encore défectueuse.

La Révolution dépouille l'église de ses objets précieux et de ses cloches, la transforme en temple de la Raison. Elle ne sera rouverte officiellement qu'en l'an XI, et dans un assez triste état, puisque, en 1809, le Conseil municipal estime à vingt mille francs la somme nécessaire à sa restauration. Les quelques réparations effectuées dans la première partie du XIX° siècle (notamment à la toiture et au carrelage) s'avérèrent fort insuffisantes. En 1835, Sainte-Foy menaçait ruine : « la couverture était dans un état de délabrement effrayant... La nef, le sanctuaire, les bras de transept étaient surmontés de voûtes en anse de panier formées de planches vermoulues dont l'écroulement était imminent » En 1836-1837, le plus urgent (la couverture) est refait, et, en 1838, la voûte du sanctuaire (plafond de plâtre sur lattes) ; puis, l'an suivant, le carrelage et les vitraux; enfin, en 1840, les voûtes d'arêtes, soit, au total, plus de treize mille francs. La voûte en bois de la nef et des bas-côtés sera achevée en 1844 et un devis existe déjà pour restaurer le porche et le portail entre autres.

Grâce à Viollet-le-Duc, qui s'y intéressa beaucoup, le classement du portail, dès 1841, allait permettre à l'Etat d'entreprendre une restauration indispensable, car, dit le rapport de cette année, « les nombreuses sculptures... ont été tellement mutilées qu'il est difficile... d'en constater la forme et d'en expliquer le sens ». Il est vrai que, dix ans plus tard, l'architecte Durand y reconnaît tout de même « les apôtres au nombre de six de chaque côté », les vingt-quatre vieillards de l'Apocalypse », des cordons d'une grande richesse d'ornementation, dans le style byzantin », et, « dans le centre..., le Christ au milieu d'une auréole, le monogramme grec au-dessous ». Si l'on renonce à reconstruire le porche (« détruit sans doute au XVI° siècle et dont les restes s'aperçoivent encore sur la place occupée par la halle maladroitement adossée à la façade principale »), on insiste pour les réparations du portail. En 1856, on lance un nouvel appel : « Le portail se dégrade tellement chaque année qu'il ne restera bientôt plus aucune des sculptures qui l'ornent » il est « disjoint dans plusieurs de ses assises et menacé de s'écrouler prochainement ». Et cependant, l'année suivante, la commission des Monuments historiques, présidée par Mérimée, rejette le projet, suivie en cela par Boeswilwald, l'inspecteur départemental, qui a déclaré que « la majeure partie de ce qui reste (des sculptures) serait perdue par une pose et dépose, même en employant les plus grands soins » et que « la statuaire... traitée avec une finesse de détails qui approche celle du porche royal de Chartres... est à, conserver dans un musée mais point susceptible d'être restaurée ». Or, le Conseil municipal tient à la restauration et, trois ans plus tard, vend à cet effet un terrain communal pour treize mille francs, tandis que le curé écrit au ministre, demandant « ordres et diligence » ; mais Boeswilwald reste sur ses positions de 1862 à 1865 ; le préfet, poussé par toute la ville de Morlaàs, écrira six fois à cet inspecteur « dont l'inertie équivaut à un refus » ; pourtant, il finira par capituler et, le 8 janvier 1866, répond enfin qu'un nouveau voyage à Pau lui a suggéré l'idée de réédifier le porche ancien en réemployant les parties sculptées qu'il sera possible de conserver.

Mais le devis est de 64.700 francs ! L'Etat en accorde seulement six mille, tandis que la commune en apporte treize mille et la fabrique six mille également ; néanmoins, les travaux commencent avec l'architecte Laffolye et l'entrepreneur Soubiran. Cependant il y aura bien des à-coups provoqués par les incessants besoins de crédits ( l'Etat y consacrera une soixantaine de mille francs ) auxquels s'oppose encore, en 1872, Boeswilwald. Puis ce sont des discussions sans fin ( marquées même par la démission du maire ) pour trouver un sculpteur qui acceptera un prix raisonnable.

C'est Bouey, de Bayonne, qui sera choisi en 1877 ; il demandera dix-huit mille francs « pour les figures, mais c'est trente mille francs qui lui seront versés jusqu'en 1892 ! Et ce n'est finalement qu'en 1902 ( alors que Bordenave d'Abère se vantait, en 1877, qu'on pourrait « dans quelques mois... admirer la restauration ! »), soit trente-cinq ans après le début des travaux, que le portail est achevé. Et c'est Boeswilwald lui-même qui, dans son rapport du 15 septembre, reconnaît enfin que « le portail de Morlaàs fait honneur au service des Monuments historiques ».

Entre temps, des travaux de charpente, en 1875, une mosaïque placée par Laffolye au sanctuaire ( sur le modèle de celle de Sorde ), une chapelle, des peintures murales ont complété la restauration de l'édifice. Depuis, tout en reconnaissant que « le gros œuvre de l'édifice est en excellent état », d'importants devis ont dû être établis pour la réparation de la toiture, de la charpente et des absidioles; avec une certaine difficulté, d'ailleurs, quant à leur conception, car si, en mars 1926, abside, clocher ( et à nouveau le portail ) ont été classés, la nef, trop restaurée, ne l'est pas...

Le résultat n'est peut-être pas brillant; l'église, depuis un siècle, a été dénaturée par ces restaurations successives où des artistes de valeur inégale ont apporté des conceptions différentes ; le portail est trop neuf, les piles de la nef disparates, les voûtes d'un mauvais goût et sans rapport d'ensemble avec le style de l'édifice primitif. Du moins a-t-on réussi à sauvegarder d'importants vestiges du passé et à conserver l'église Sainte-Foy « dans sa majestueuse et sévère pauvreté »

 

Description

Le plan de l'église Sainte-Foy de Morlaàs est celui des églises bénédictines à transept peu saillant avec nef et bas-côtés prolongés par abside et absidioles en hémicycle ( Il est à remarquer que tout le chevet est très sensiblement dévié vers la gauche, ce qui semble bien indiquer ( malgré les réserves qui ont été maintes fois adressées à cette théorie ) qu'il s'agit là d'une application du principe de l’inclinato capite… L'édifice ( orienté comme à l'habitude ) n'a pas moins dans l'œuvre, de cinquante-cinq mètres de long pour près de vingt de large aux nefs et vingt-cinq au transept. Les matériaux utilisés sont les cailloux roulés, pour le chevet en particulier, un grès jaunâtre devenant parfois rougeâtre en se décomposant, d'appareil très régulier aux collatéraux, au portail et aux fenêtres, et le même grès ( mêlé de nombreuses briques provenant de la restauration ) au clocher à gâble et ( moins les briques ) comme parement de l'ancien.

Aux parties hautes de la nef (postérieures au Moyen âge). la brique domine.

 

Abside et absidioles. — Un simple coup d'œil sur Sainte-Foy permet de se rendre compte que la partie la mieux conservée est celle placée à l'orient, c'est-à dire l'abside et les absidioles qui la flanquent. Cette partie de l'édifice est surtout remarquable à l'intérieur.

L'abside, profonde de onze mètres et large de huit, élève à la même hauteur que la nef ( soit une douzaine de mètres ) une voûte dont le cul-de-four précédé d'un berceau est caractérisé ( comme le ressaut qui les sépare et l'arc triomphal à simple rouleau ) par une brisure, plus légère pour le sanctuaire proprement dit. Au contraire, aux absidioles, d'ailleurs encore plus restaurées, le cul-de-four et le berceau qui le prolonge ( sans aucun arc de séparation ) présentent, comme l'arc d'ouverture, le plein cintre habituel au style roman. Ces absidioles, étroites et longues, sont nettement plus modestes que l'abside, par leurs dimensions, par la simplification de l'architecture et de la décoration ; c'est ainsi qu'au lieu des trois baies qui éclairent l'abside, il n'y a ici qu'une fenêtre ( ouverte à l'est ) et que, au lieu des quatre pilastres qui renforcent extérieurement les murs du sanctuaire principal, il n'y en a qu'un seul pour chaque absidiole.

Dans la décoration, le contraste est bien plus grand encore alors que l'absidiole n'est ornée que de simples entrelacs et palmettes inscrites placées en bandeau chanfreiné sur les pilastres d'entrée et que les ouvertures ébrasées sont nues, les fenêtres de l'abside, aussi bien à l'intérieur qu'à l'extérieur, sont des plus remarquables : surtout, les colonnes à chapiteau sculpté qui les encadrent dans le sanctuaire représentent actuellement la partie la plus intéressante de la sculpture. 

Comme dans les principales églises romanes du Béarn ( Lescar, Sainte-Croix d'Oloron, Lacommande, Lucq...), ces arcatures au cintre légèrement déformé ( trois ici ) entourent le sanctuaire, séparé du chœur proprement dit par de simples pilastres; ceux-ci supportent la retombée occidentale de deux arcs, tandis que, derrière l'autel, les arcades reposent sur des colonnes monocylindriques à base romane sur socle rectangulaire. Mais ces colonnes valent surtout par leurs gros chapiteaux bien conservés. À gauche sous un tailloir à palmettes et rinceau, la vaste corbeille présente un fouillis de fins branchages entrelacés, parfaitement détachés de la masse, et qui semblent retenir prisonniers au registre inférieur des quadrupèdes adossés ou affrontés ( lions, sans doute ), puis un serpent et, aux angles supérieurs, des monstres mafflus aux longs bras. Le chapiteau de droite offre une même complexité décorative tailloir aux longues palmettes polylobées, bien alignées, et corbeille aux entrelacs extrêmement enchevêtrés avec de longues feuilles en volute.

Un peu au-dessous des chapiteaux, les fûts des colonnes sont bagués d'un double rang de billettes en bandeau chanfreiné, qui se poursuit horizontalement tout autour du sanctuaire, et forme le soubassement des trois fenêtres romanes. Celles-ci sont surmontées d'un cordon d'archivolte* formé de trois rangs de billettes à la baie centrale, tandis qu’aux deux autres, il s'agit de petites sphères espacées sur le bandeau. Dans l'angle rentrant se dressent les colonnes à chapiteau supportant l'archivolte torique qui encadre l'ouverture en plein cintre. Les colonnettes ont l'habituelle base romane avec cette originalité, cependant, du tore supérieur travaillé en torsade. Les corbeilles ( sous un vaste tailloir à entrelacs, rinceaux ou fleurons avec, généralement, tête de lion en angle ) sont naturellement bien plus petites que celles de l'arcature, mais tout aussi décoratives, d'une technique aussi sûre, et, de plus, très variées. À la fenêtre nord-est, deux rangées de feuilles font face à deux lions antithétiques*, assis sur leur croupe, tirant une longue langue, et d'une parfaite symétrie. La fenêtre centrale est de beaucoup la plus intéressante avec ses chapiteaux historiés, surtout la corbeille gauche où l'on voit le bourreau se préparant à frapper de l'épée sa victime agenouillée, mais dont le buste se redresse fièrement une sainte que l'on voit sur l'autre face tenant la palme du martyre il s'agit certainement de sainte Foy, patronne de l'église. L'autre corbeille, avec son personnage debout et tenant deux lions enchaînés, doit symboliser le triomphe de la Foi. À la baie sud-orientale, les deux scènes représentent l'Annonciation et la Visitation d’une part, la scène symbolique des deux colombes au corps écailleux enserrant le démon de l'autre; ces chapiteaux sont actuellement peints, mais leur netteté en est accentuée...

À l'extérieur, ce sont ces trois fenêtres qui constituent toute l'ornementation du chevet; cependant, Cénac-Montaut fait allusion à des bandes lombardes et à la corniche à modilIons* ( ceux-ci détruits, il est vrai ) pour les trois absides, là où il n'y a plus aujourd'hui que simples pilastres tronqués sur lesquels repose le rebord du toit ; il apparaît donc qu'il y a en mutilation assez récente et fort regrettable. En tout cas, la disposition des fenêtres reproduit celle de l'intérieur soubassement à deux rangs de billettes, se prolongeant horizontalement tout autour de l'abside, cordon d'archivolte à billettes plus petites et sur trois rangs ; mais les colonnettes supportent une massive voussure de grès en plein cintre dont l'angle seul est amorti en boudin. La colonnette trapue présente, parfois, la base au tore supérieur en cordelière, et le chapiteau à large tailloir est toujours décoré. Bien que ces sculptures soient abîmées par les intempéries, on reconnaît la plupart des motifs, d'ailleurs plus frustes qu'à l'intérieur du sanctuaire. Ainsi, à la fenêtre nord-est, sous des tailloirs aux entrelacs tenus dans la gueule placée en angle ou aux fleurons inscrits, un aigle au corps écailleux déploie ses ailes, tandis que, en face, des lions se dessinent sous les crosses d'angle. À la fenêtre orientale, une seule corbeille est lisible; sous le tailloir aux belles palmettes, ce sont des feuilles en volute supportant les habituels fruits ronds ; l'autre chapiteau est trop usé ; on n'y distingue que les entrelacs du tailloir. Enfin, on retrouve, à la baie du sud-est, des fleurons inscrits et des palmettes à fruits, et surtout un curieux singe accroupi et bedonnant... En somme, un travail un peu fruste réalisé dans le courant du XII° siècle...

 

Transept, nef et « narthex ». - Le reste de l'édifice, surtout à l'intérieur, est loin d'offrir le même intérêt trop de restaurations, nous l'avons vu, l'ont défiguré. Le transept, les bas-côtés et la nef ont une voûte légère de bois peint, vieille d'un siècle seulement, dessinant au vaisseau principal de minces arcs ogifs, sauf aux collatéraux où le plancher en appentis forme des compartiments rectangulaires ; l'effet en est évidemment désastreux au point de vue archéologique et pour l'unité du monument ! Par contre, les supports ont mieux résisté. À la croisée de transept, on remarque les gros piliers aux arêtes vives, notamment ceux de plan cruciforme à l'entrée de la nef, tandis que ceux placés à l'entrée du chœur sont moins complets ils supportent des arcs brisés à simple rouleau. Les piliers séparant les quatre travées de la nef sont également très massifs ; quatre sur six ( dont les trois placés au sud ) sont sur tambour cylindrique : deux ont le fût arrondi, le troisième est polygonal ; les deux autres piliers ( nord ) sont, l'un rectangulaire, l'autre carré. Il est remarquable que les piliers méridionaux ne correspondent pas exactement à ceux qui devraient leur faire face, mais sont tous trois légèrement placés plus à l'est. Nous ne croyons pas à une intention symbolique mais plutôt à la conséquence des reconstructions de plusieurs de ces supports à des époques différentes, les plus anciens nous paraissant être les piles cylindriques ; une inscription parfaitement conservée sur l'une d'elles nous permet de la dater ; la voici traduite : « L'an du Seigneur 1301, Pierre de Thèze ( que Dieu lui pardonne ses péchés ) fit faire ce pilier et cet autel, en l'honneur de Dieu, à saint Orens et à sainte Foy » Quant au pilier carré, une inscription de 1724 indique la date de sa reconstruction...

Mais il faut une mention spéciale pour les énormes piliers qui marquent la travée occidentale ou limitent une sorte de porche intérieur, de narthex. Leur massivité s’explique par leur rôle de soutien pour l'ancien clocher carré écroulé, des demi-piliers leur répondent contre le mur occidental. La voûte en croisée d'ogives ( abîmée ), dépourvue de clé, avec ses arcs diagonaux à section torique reposant de toute leur section sur le chapiteau roman, est incontestablement un archaïsme, Les collatéraux et le transept n'offrent guère d'intérêt et la décoration de cette partie de l'église reste pauvre. Signalons tout au plus, au mur méridional du transept, les vestiges d'un enfeu* du XIV° siècle ; l'arc brisé d'archivolte a son bandeau terminé par un buste ; le boudin à méplat qui constitue cet arc se retrouve à la voussure polylobée où il alterne avec des cavets ; les piédroits ( aux moulures identiques ) ont des bases polygonales et des chapiteaux décorés, en faible relief, d'animaux fantastiques à tête humaine ; le sarcophage qu'ils encadraient a été remplacé par un autel dédié à saint Joseph.
 

L'éclairage. — La nef est pourvue d'un éclairage direct composé de huit oculi* de deux mètres de côté, avec remplage* flamboyant dont le motif est une étoile rectiligne ou curviligne ; mais si ces baies semblent partiellement anciennes, il n'en est pas de même de quatre autres, étroites et en plein cintre ( remplaçant les primitives barbacanes ) qui éclairent chacun des bas-côtés : on peut s'en assurer par l'examen extérieur qui révèle, par contre, une fenêtre à plein cintre authentique aux deux bras du transept, et aussi la trace des étroites baies romanes aux collatéraux... Sous le grand toit d'ardoise en bâtière* et à forte pente de la nef et des bras du transept, et celui, en appentis, des collatéraux, les murs apparaissent ainsi dans leur austérité et leur monotonie, d'autant plus qu'ils sont dépourvus de contreforts aux bas-côtés. L'appareil est dissimulé par le crépi récent, mais on peut encore reconnaître quelques marques de tâcherons sur l'un des contreforts du transept nord ainsi la lettre S.

Il subsiste du même côté un ancien enfeu ( qui donnait sans doute sur l'ancien cloître ) et, sur le même mur toujours ( de part et d'autre d'une porte neuve ), les restes murés d'une entrée en arc brisé, et d'une autre, plus ancienne encore, avec son plein cintre et son tympan nu. SignaIons aussi, à la base d'un des contreforts septentrionaux du transept, le réemploi d'une tête humaine, sculptée sur un ancien corbeau.

 

La façade occidentale ; clocher-pignon et portail.

-Encadrant cet avant-corps, les murs de tête des collatéraux présentent sur leur grès rougeâtre très usé des traces originales de la vieille architecture ; chacun d'eux comprend une grande arcade aveugle en plein cintre, dans laquelle s'ouvrait un oculus aujourd'hui bouché ; celui de droite est entouré d'une torsade, l'autre se découpe en quadrilobe entouré d'un cavet garni de petites sphères... Au-dessus de l'arcade s'ouvre une très étroite baie en plein cintre avec large ressaut...

Dominant l'avant-corps, et plaqué contre le toit et les combles de la nef dont il épouse par ses rempants la forte pente, se dresse un grand clocher-mur de grès régulier et de briques au pignon aigu flanqué de petits contreforts ; les crochets des rempants et des quatre pinacles ( les deux grands pourvus de petites gargouilles ) festonnent. élégamment ses contours ; le mur est percé de trois baies pour les cloches celle placée sous l'acrotère* est la plus vaste et la plus soignée avec son arc en accolade supporté par deux petits animaux accroupis ; entre les deux baies inférieures ( dont l'arc est simplement surbaissé ), un grand oculus est occupé par l'horloge moderne qui dépare l'ensemble.

Tout cela est assez modeste mais ne justifie pas la sévérité de Cénac-Montaut quand il parle de la « triste ornementation de cette façade informe ! » ; il est vrai qu'il y comprenait le portail alors en ruine...

Ce portail se détache aujourd'hui magnifiquement ( tel qu'il fut à son origine ), creusé en coquille sur un avant-corps construit en grès jaune d'appareil très régulier. Malheureusement, la restauration, malgré sa fidélité, n'a laissé subsister que fort peu des sculptures primitives. Il n'est, d'ailleurs, pour s'en rendre compte, que de comparer l'œuvre actuelle avec les descriptions et surtout les gravures datant de 1850 ou de 1860. Prenons, par exemple, l'ouvrage de Cénac-Montaut, et nous verrons que toute la partie inférieure du portail est détruite : « Au lieu de deux colonnes seulement, il possédait ( de chaque côté ) quatre statues de grandeur naturelle séparées par trois colonnes, mais tout a été complètement détruit : une seule a conservé quelques traces de nimbe. À la clé, l'agneau pascal, aujourd'hui détruit... La voussure s'appuie sur deux cariatides... on ne reconnaît plus celle de gauche... Dans le tympan, on ne distingue plus aux pieds du Christ que l'ange de saint Mathieu et l'aigle de saint Jean... Les bas-reliefs des deux petits tympans à plein cintre ont complètement disparu... »

En résumé, Lallier disait déjà, en 1840, que « ce portail s’est tellement défiguré qu'il est presque impossible de distinguer les sujets sculptés... Il est même douteux qu'on puisse le restaurer tant son délabrement est grand ». De plus, et afin d'éviter le caractère disparate qui résulterait du mélange des morceaux neufs et d'éléments anciens ( et aussi pour ne pas avoir de nouvelles réparations à effectuer ), les restaurateurs n'ont pas hésité à enlever toutes les pierres sculptées plus ou moins abîmées. Aussi, exception faite de quelques claveaux de la voussure extérieure, de l’un des vieillards et de plusieurs palmipèdes, presque tout le reste, dans l'ornementation de ce portail, est l'œuvre du XIX° siècle.

Sous la corniche à modulons, et entre les deux petits contreforts à glacis supportés par des colonnes à chapiteau feuillagé, quatre voussures à plusieurs bandeaux retombent alternativement sur les arêtes vives des piédroits ou sur les colonnettes à chapiteau placées dans les angles rentrants ; elles encadrent un tympan dont la partie inférieure se découpe en deux niches en plein cintre ; la retombée intérieure de ces petits arcs est supportée par le trumeau divisant la porte d'accès à l'église. Ce tympan ( de même architecture que celui d'Oloron-Sainte-Marie ) présente un Christ en majesté, encadré de l'ange et de l'aigle sculptés en méplat ; à ses pieds, la garniture d'un chrisme. Dans les tympanons ( encadrés du boudin et du bandeau à billettes ), les bas-reliefs représentent le massacre des Innocents et la fuite en Egypte. Encadrant le tympan, de frêles entrelacs ondulent sur le bandeau et le tore limitant la première voussure. Au-dessus, en deux files se rejoignant au claveau supérieur, s'alignent des canards se lissant les plumes ou avalant parfois un ver, un escargot, et dont les pattes reposent sur un tore garni de fleurons très fouillés. À la voussure suivante (séparés des canards par un petit bandeau d'entrelacs, l'intrados* à billettes et le tore ici découpé en losanges formant gaufrage ) sont assis les vingt-quatre vieillards de l'Apocalypse, jouant de la viole ou tenant un vase à parfum de façons très différentes ; ils se contorsionnent dans leurs vêtements aux plis très accusés. Au claveau supérieur, l'agneau pascal préside le groupe, tandis que les extrémités de la file des vieillards reposent sur les épaules de deux sortes d'atlantes qui fléchissent sous le poids. Un alignement de petites sphères à l'intrados*, un large bandeau garni de beaux fleurons à cinq pétales inscrites et un petit tore décoré de baguettes forment transition avec la dernière voussure où, sous une frise de jolis rinceaux entrelacés, une série de trente-cinq personnages s'assied sur un boudin dans les attitudes les plus différentes : ce sont les âmes des justes ou des anciens martyrs qui achèvent la Cour céleste entourant le Christ triomphant ; leurs courtes tuniques aux plis parallèles moulent leurs membres plus ou moins contorsionnés; ils inclinent ( parfois jusqu'à le coucher sur l'épaule ) ou élèvent leur visage, tantôt imberbe, tantôt abondamment pileux, serrant souvent les mains sur leur poitrine en un geste de prière. Sur les piédroits (séparés des voussures par la corniche formant tailloirs garnis de palmettes en rinceaux et de fleurons profondément travaillés, sont plaquées les statues des apôtres qui ne manquent pas d'archaïsme, notamment par la disposition des pieds écartés et les plis en virgule des vêtements ; ils alternent avec les colonnes dont les chapiteaux sont purement décoratifs ( entrelacs avec animaux plus ou moins fantastiques ) ou historiés ( scènes de la Bible ). Enfin, au trumeau, sous les fruits et feuillages du chapiteau, les entrelacs, oiseaux, etc... du fût de la colonne, deux esclaves enchaînés qui soutiennent l'ensemble ont été placés là par la fantaisie du sculpteur Bouey qui a reproduit exactement ceux d'Oloron. Nous avons déjà noté plusieurs points de ressemblances avec le portail d'Oloron : la disposition du tympan, les vingt-quatre vieillards de l'Apocalypse, etc...
 


Définitions de mots :

antithétiques : opposés.

archivolte : Ensemble des voussures d'une arcade, d'un portail.

oculi : (de œil) petite fenêtre, souvent ronde.

remplage : Archéol. Réseau de pierre garnissant l'intérieur d'une fenêtre ou d'une rose, dans le style gothique; chaque élément de ce réseau.

bâtière : toit à deux pentes

enfeu : Archéol. Niche funéraire à fond plat pratiquée dans les murs des églises pour y recevoir des tombes. Des enfeus.

l'acrotère : Archit. Socle placé aux extrémités ou au sommet d'un fronton, pour servir de support à des statues et autres ornements; cet ensemble ornemental.

intrados : Archit. Partie intérieure et concave d'un arc, d'une voûte.

modilIons : Archit. Ornement en forme de console renversée placé sous la saillie d'une corniche ou appliqué à un mur, pour supporter un vase, un buste.

 


Le musée de Morlaàs


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