Dernière modification: 20/05/2015

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Jeudi 19 février 2015.

Tha U-Then - Thakhek ( 44 km )

 

     

 

Aujourd'hui, c'est un peu l'aventure, car je n'ai pas réussi à savoir si je devais passer la frontière au pont, à dix-huit kilomètres de Tha U-Then, ou à Nakhon Phanom, à trente kilomètres. Quand je demande un renseignement, à plusieurs personnes, aucune ne me donne la même réponse. Je ne suis pas très dynamique : je crois que j'ai un peu la flemme ! Je roule à bonne allure et il me semble que je n'avance pas. Le panorama ? Il est caché par des haies touffues, et de plus je ne suis pas sur le bord du Mékong. Je m'arrête pour manger ma soupe de nouilles, je prends la direction du pont, sur une route toute neuve, toute large et tout à fait déserte. À la frontière, personne ne semble étonné de voir un cycliste : j'ai espoir de pouvoir traverser. Une femme arrive, en tenue de policier et elle me lance d'un air arrogant, dans un mauvais anglais : « il faut attendre le bus ici ! » Elle se calme un peu quand je lui parle en thaï. (Au retour, les Laotiens me laisseront traverser le pont en vélo). Je fais tamponner mon passeport en deux minutes, et le bus arrive. Il n'y a presque personne dedans, alors le chauffeur me fait monter avec... mon vélo. Je vais jusqu'au fond du bus avec mon VTT et ça fait beaucoup rire les quelques passagers présents. Dès qu'on a traversé le pont, je redescends avec mon vélo, je fais mon visa laotien en quelques minutes ( 30 $ ) et je me prépare à reprendre la route. Soudain, quelque chose m'intrigue : je n'ai pas de tampon d'entrée. Je reviens à la guérite et je me rends compte que le policier dort, avachi sur une chaise, le bec ouvert. Je venais de passer sans le voir, car il ne dépasse pas au-dessus du comptoir. Je pense que j'aurais eu des ennuis au moment de sortir du pays si je n'avais pas eu de tampon d'entrée dans mon passeport...

 

     

 

Je suis au Laos, on roule à droite, et la route est nettement moins bonne qu'en Thaïlande. Je passe devant des maisons cossues, toutes dans le même secteur, et je pense que les propriétaires ont voulu « jouer au plus riche », ce qui les a poussés à afficher leur mauvais goût. L'une ressemble à un château arabe, agrémenté de carrelage blanc et noir, une autre éclate de couleurs criardes à faire peur aux oiseaux ! J'arrive à Thakhek par une route bordée de bâtiments disparates parmi lesquels quelques maisons coloniales plutôt décrépites arborent encore leur couleur pêche. Je vais à « Khammouane inter Guesthouse ». Je ne pouvais la rater, elle est de couleur vert pistache et c'est très joli au soleil. Je vais sur la place où l'on a installé des jeux et des autos tamponneuses pour les enfants. Des marchands de grillades proposent des brochettes d'abats de poulet ou de porc le long du fleuve. La petite « place de la fontaine » bordée de maisons coloniales mal entretenues n'a pas beaucoup changé depuis l'époque où les colons, avec leur casque et leur costume blancs venaient boire l'apéritif en terrasse à « l'heure verte ». Moi, je vais boire ma bière en regardant les derniers reflets du soleil dorer l'eau du Mékong. En face, la ville de Nakhon Phanom est toute illuminée. À un angle de la place, un très vieil arbre laisse pendre ses racines aériennes comme des cheveux. On ne sait plus où est son tronc, et un palmier a pris racine dans ses branches et parvient à le dominer. Je rencontre deux Suisses et deux Français ( Benett et Célia ) et nous dînons ensemble, en terrasse avec une vue panoramique de Nakhon Phanom de l'autre côté de l'eau aux reflets multicolores. Les pointes dorées de deux temples dominent les maisons basses de la ville thaïlandaise.

 

     

 

Vendredi 20 février 2015.

Thakhek ( 5 km )

Je vais manger ma soupe de nouilles au bord du fleuve et je retrouve les couples de Français et de Suisses. Nous restons toute la matinée à raconter des histoires. Le reste du temps, je me repose dans ma chambre, je lis, je regarde TV5 ( la chaîne française ). À six heures, je vais avec Célia et Benett pour jouer à la pétanque. Les Français ont apporté ce jeu durant la colonisation et l'on trouve des boulodromes dans toutes les villes laotiennes. Un orage vient rafraîchir l'atmosphère, et nous allons sous une pluie tiède et bienfaisante jusqu'au restaurant où nous avons pris l'habitude de prendre nos repas. On mange du canard où il n'y a que des os, et du porc où il n'y a que du gras. Au moment de payer, on fixe nous-mêmes le prix à la baisse.

 

Samedi 21 février 2015.

Thakhek ( 41 km )

 

     

 

Célia et Bénett sont partis avec une moto de location : ils vont faire le circuit que je compte faire, mais dans l'autre sens. Je vais jusqu'au pont international, juste pour ne pas rester inactif toute la journée. Le temps est orageux, mais il ne fait pas trop chaud. De retour à Thakhek, je vais visiter l'église catholique décorée avec des lampions chinois, et je parle en français avec sœur Geneviève, une religieuse laotienne dont le frère est prêtre à Toulouse.

La ville est presque déserte. C'est le Nouvel An chinois, et la plupart des boutiques ont été transformées en salles à manger, et partout les gens font de grands festins en famille, les enfants jouent avec des pétards : c'est la fête depuis deux jours et ça va certainement continuer. En Asie du Sud-est les fêtes de Nouvel An se suivent : il y a le premier janvier, puis en février le Nouvel An chinois ou la fête du Têt ( vietnamien ), puis en avril le « Sonkhran » ( Nouvel An thaï, cambodgien et lao ).

Le soir, ce ne sont plus des pétards qu'ils font exploser, ce sont carrément des bombes. Beaucoup de couples ont attendu ce Nouvel An pour se marier : on fait la noce ! Il pleut encore un peu vers vingt heures, et ce n'est pas habituel en cette saison. C'est sûr : le climat change !

 

 

     

Dimanche 22 février 2015.

Thakhek - Song Hong ( 55 km )

Temps légèrement couvert, il est neuf heures, je pars vers le nord, le long du Mékong que je ne vois pas à un seul instant : il est caché derrière les fourrés. Je suis sur la N13, celle qui mène à Vientiane et même plus loin puisque c'est aussi bien la route Nord-Sud, que la voie qui mène vers le Vietnam. Bien que ce soit dimanche il y a de la circulation et surtout ces 4x4 qui vont trop vite et qui sont les « Rois du macadam ». Je ne suis pas toujours très tranquille d'autant plus que les bas-côtés étant souvent en mauvais état, je suis obligé de rouler sur la chaussée. Dans ces périodes de fête, la plupart des usagers conduisent en état d'ivresse... Vers dix heures, le ciel se dégage et la chaleur devient un peu suffocante. Le décor est tout à fait banal : des arbres, des buissons, des pistes en latérite, de la terre jaune-orange mêlée à de petits graviers... Il faut reconnaître que ce n'est pas aussi cultivé qu'en Thaïlande, alors je traverse des villages plutôt pauvres, aux maisons de bois noir. Celles qui sont situées en bord de route sont souvent de petites épiceries et échoppes de nouilles. Je passe Song Hong car les deux hôtels sont trop chers ( 11 euros ) et comme on m'a signalé une guesthouse plus abordable à trois kilomètres : « Gaumlai G.H ». C'est là que je dépose mon sac à dos. Il fait très chaud et je suis content de pouvoir m'allonger sous le ventilateur. Je suis isolé sur la crête d'une colline, dans le lointain, je distingue les montagnes au profil tourmenté parmi lesquelles je vais me promener ces jours-ci. Sur le versant voisin, on a planté du manioc : cela ressemble à de petits arbustes bien alignés. De gros nuages blancs s'étalent voluptueusement. À l'horizon, le ciel gomme les montagnes qui disparaissent dans une brume bleutée, et il finit par toucher la terre. Des grondements lointains annoncent un orage. Je me sens bien : j'aime ces déchaînements spontanés de la nature, j'aime ces ondées soudaines qui surviennent accompagnées de vents et de tourbillons. Dans une trouée de nuages, étincelant dans le ciel bleu, un avion file vers l'ouest. J'imagine les passagers serrés dans leur siège comme des canards au gavage en train de manger du poulet sauce aigre douce avec du riz. Demain ils seront à Londres, Berlin ou Paris, dans le métro qui pue la foule. Ils seront entourés de gens qui pianotent sur leur tablette en faisant la gueule parce qu'il pleut et qu'il fait froid depuis une semaine... Du coup, en me concentrant un peu sur ces images, je prends conscience de leur détresse, et même si je ne sais pas si je vais trouver quelque chose à manger pour ce soir, je me sens bien au milieu des plantations de manioc !

Il est dix-huit heures, le jour décline, je me décide à aller chercher mon dîner dans le petit paquet de chaumières qui bordent la route, à un kilomètre. Je n'ai pas le choix : il n'y a que des brochettes bizarres, de minuscules morceaux de viande noire, et des pommes chips importées de Thaïlande. Par contre, je n'ai aucune difficulté pour trouver une canette de bière. Alors que je rentre à l'hôtel, une pluie fine commence à tomber. J'essaye de manger les brochettes, mais elles sont dures comme du pneu de tracteur, et elles sentent la viande faisandée. La marchande m'a dit que c'était du bœuf... ça doit être vrai, car le chien de l'hôtel se régale. Je ne suis pas un connaisseur !

 

     

 

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