Dernière modification: 17/05/2015
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Mercredi 11 février 2015. Bueng Khan ( 32 km )
Je décide de passer la journée ici. Je vais dans la ville ( je n'ose pas dire « au centre-ville » ). Me voilà réhabilité avec Bueng Khan ! Quelques rues très commerçantes convergent vers le marché central, vaste halle où tout se vend, du porte-clés aux couleurs du club de foot de Liverpool aux énormes poissons-chats agités de convulsions au fond de leur cuvette en passant par les articles de vannerie... Je me rends au bord du fleuve : c'est un énorme chantier où des pelleteuses chargent des camions qui vont déverser leur chargement de terre à quelques mètres, sur le rivage. On dirait des crabes et des bousiers grouillant dans un univers de terre rouge et de fumée noire. Pourquoi ce gigantesque chantier ? Tout simplement pour aménager le bord du fleuve pour en faire une promenade ou un mignon petit jardin, mais surtout pour construire une protection de façon à ce que le Mékong ne vienne pas emporter toutes les maisons se trouvant sur le rivage. À force d'enlever les bancs de sable, en amont, qui freinent les eaux lorsque le fleuve est en crue, on change la puissance déjà colossale de son débit en furie destructrice.
Je prends la petite route bétonnée qui suit le Mékong vers l'est. Je fais une petite halte au temple chinois aux décorations extravagantes... on dirait un décor de film ! Toujours les petites villas alternant avec les constructions traditionnelles en bois. Aucune de ces habitations n'est tournée vers le fleuve : elles donnent sur le côté route. Cela prouve bien que nous, en Occident, nous n'avons pas du tout les mêmes valeurs. Nous voyons le côté agréable, belle vue et tranquillité ; ici on se tourne vers le passage, la vie, la commodité. Il faut dire que de petits commerçants passent à longueur de journée sur la route en proposant diverses marchandises : poissons, plats cuisinés, légumes, glaces et sorbets. Les artisans eux aussi proposent leurs services en passant avec une voiture sonorisée. Je longe des forêts d'hévéas (arbre à caoutchouc) où les petits pots de terre ont été remplacés par des pots de plastique. On y perd en esthétique, on y gagne en légèreté. Je rejoins la route principale. On dirait presque une piste d'aérodrome tant elle est large et déserte. Dans les régions que j'ai traversées, je peux affirmer que le réseau routier thaïlandais est nettement plus moderne et de meilleure qualité que le réseau routier français. La moindre route est goudronnée avec un revêtement en « enrobé » ou bétonnée, et les axes principaux sont en parfait état, bordés de bandes d'urgence suffisamment larges. Je m'arrête en bord de route pour manger un demi-poulet cuit sur le grill, avec du riz gluant. Le « khao gnéo » est un riz dont les grains se collent entre eux à la cuisson, et on le mange en détachant des boulettes un peu comme on fait chez nous avec le pain. À huit heures, le patron de l'hôtel m'amène en moto jusqu'au « festival », à deux kilomètres. Le quartier est tout illuminé : c'est à la fois un marché de nuit et une foire-exposition. Je m'attendais à un spectacle de danses et de musique traditionnelle, mais il faut attendre minuit pour voir un spectacle sur scène qui ne vaut peut-être même pas la peine que j’attende. En ce moment, il y a une élection de « Mis foire » et un gars qui braille sur scène, des manèges d'un autre siècle et toutes sortes de choses sucrées ou salées qui se mangent. Mais il n'y a pas les sucreries ou les friandises que j'aime, ni les grillades... Alors, je mange une soupe de nouilles au bœuf. Pour revenir à l'hôtel, il n'y a aucun touk-touk. Les parkings sont pleins de motos et de voitures : les gens sont tous motorisés. Un jeune homme aimable se propose de me ramener à l'hôtel gratuitement en moto.
Une ambiance de fête, une insouciance contagieuse : la joie de vivre des Thaïlandais est communicative !
Jeudi 12 février 2015. Bueng Khan - Bung Khla ( 62 km ) On ne se pose même pas la question de savoir quel temps il va faire dans la journée puisque le ciel est toujours bleu. Je m'ennuie parfois sans les beaux nuages blancs, les énormes cumulus qui enrichissent le paysage. Je pars à neuf heures pour quarante kilomètres de route tantôt trop large, tantôt trop étroite pour le trafic. Je n'ai plus peur sur la route : on s'habitue à tout. J'ai eu cependant une petite frayeur quand, en levant les yeux, j'ai vu un énorme camion me foncer dessus en doublant un car. J'avais le choix entre un profond fossé sur ma gauche ou alors me faire friser les poils des mollets en restant sur l'étroite bande d'urgence. Le camion a dû passer à un mètre, mais ce que je ne savais pas, c'est qu'il tractait une remorque qui m'a obligé à m'accrocher à mon guidon comme si un cyclone se déchaînait brusquement.
La route monte et descend, je ne vois pas souvent le fleuve, mais je sais qu'il n'est pas loin, car de chaque chemin sortent des camions de sable qui perdent une partie de leur chargement sur la route, ce qui rend les accotements impraticables. Je donne un petit coup de sonnette devant les petits hôtels des esprits au cas où il leur prendrait la lubie de traverser. Il faut se méfier : les phis, ça court partout ! Je passe Bung Khla sans m'en apercevoir, car la petite agglomération est en dehors de la grande route. Ce n'est pas une ville, c'est un village qui a des allures de village de western. Il n'y a pas de « 7-eleven », pas de supérette, que des petites épiceries qui font en même temps office de quincaillerie ou de pharmacie. Le village est peu attrayant, par contre, les bords du Mékong dégagent toujours la même quiétude. De sympathiques petits hôtels proposent des bungalows en bord de fleuve. C'est souvent un peu cher pour ma bourse de routard, mais je réussis toujours à trouver quelque logement agréable. De nombreuses barques sont retenues par de longs bambous qui, de loin, donnent l'impression qu'elles ont un mât. Sur la rive laotienne, à part un pont sur la route 13 menant à Vientiane, on ne voit pas trace humaine. On a parfois tendance à croire que le Laos est un pays inhabité ! Je vais manger des poissons frits à l'ail, et je longe le fleuve, parmi les plantations d'hévéas, les bananiers et les champs de petites tomates bien rouges, parfumées et juteuses, mais à la peau un peu trop dure. Les Thaïs ne les mangent jamais en salade... Je ne sais pas pourquoi. |
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