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Myanmar (Birmanie)

Mercredi 29 décembre 2010.

Bangkok – Yangon ( Myanmar )

Je pars au Myanmar à quinze heures. Je vais à l'aéroport en taxi ( 200 bahts ). Il est midi, et nous commençons par rester englués dans les bouchons qui paralysent la ville aux heures de pointe. Dans Bangkok, on ne circule facilement que le dimanche ! Nous prenons l'autoroute qui compte huit voies plus les bandes d'urgences. Chacun roule où il peut double de n'importe quel côté et se faufile allègrement. La majorité des usagers circule à quatre-vingt-dix kilomètres heures, et mon chauffeur décide de me faire un numéro digne du film « Bullit ». Il se lance à cent vingt et même cent trente dans ce maelström, et c'est vraiment du « Hitchkok à Bangkok ». Nous doublons à droite, à gauche, si l'on pouvait passer par-dessus on le ferait ! Je suis monté devant, et comme la conduite est à droite, je suis à la place qu'occupe, chez nous, le chauffeur. Comme je suis très concentré, au moins autant que le « taxi driver », je suis mal à l'aise de ne pas avoir de volant devant moi, et je n'arrête pas d'appuyer mes pieds sur le plancher, comme si je pouvais freiner ! Je ne demande pas de ralentir, car lorsque la vie a un peu de piment, il faut laisser faire, et puis le gars se tire honorablement de toutes les situations. Quand nous arrivons à l'aéroport, je me sens tout de même soulagé, mais heureux : cette petite poussée d'adrénaline m'a fait du bien. Maintenant, je serais ridicule d'avoir peur en avion où le danger est bien moindre !

     

L'aéroport de Bangkok n'a rien pour me plaire ; tout est cher ! L'avion survole des rizières formant une éblouissante mosaïque, puis des montagnes couvertes de jungle. Nous découvrons le Golfe du Bengale et une côte sablonneuse où le typhon de 2007 a fait de nombreuses victimes et nous retrouvons des rizières desséchées, avec de temps en temps un petit hameau ou une chaumière isolée. Pas de route, aucun moyen de communiquer, pas d'électricité... Je serais tout de même curieux de savoir comment vivent les gens qui habitent là ?

À partir de l'aéroport, je prends un taxi pour sept dollars alors que le tarif habituellement demandé est de cinq, mais le chauffeur est sympathique et je n'ai pas envie de marchander. Cette générosité ne durera pas ! J'arrive à la « Golden Smiles guest house ». C'est un vieil édifice colonial pourri à la façade maintes fois repeinte avec des badigeons qui ont chacun laissé une trace, et par-dessus, une couche noire de moisissure qui finit de donner un aspect sinistre. J’emprunte un vieil escalier crasseux. Le gars qui m'accueille est débordant d'attention, mais il ne peut me proposer qu'une chambre à trois lits, le reste étant complet. La fenêtre ferme mal et donne sur un chantier où des ouvriers creusent les fondations d'un futur immeuble. Ils travaillent comme des archéologues, accroupis, à se relayer pour piocher. Ils ne sont que huit : je crois que le chantier va durer un bon moment.

À la nuit tombée, je fais le tour du quartier. Les trottoirs sont si défoncés qu'un deux-roues aurait du mal à les emprunter. Les grosses dalles du pavage sont soulevées, bancales et parfois même manquantes, faisant place à un trou béant. Comme les rues sont si mal éclairées qu'on ne voit même pas où l'on met les pieds, je décide de marcher sur la chaussée. Là, le danger est tout autre. Les bus et les voitures roulent plein phares, ce qui fait que je ne vois plus les cyclistes sans lumières qui me frôlent. Tiens, au fait, il n'y a aucune moto... Interdit ! Heureusement finalement, car le jour où il y en aura autant qu'à Bangkok, la vie sera devenue invivable. Du fait que les Birmans ont peu de véhicules personnels, les bus débordent, les passagers réussissant à trouver une place sur le marchepied de la porte laissée ouverte s'estimant heureux. J'arrive sur le grand rond-point de Sule Pagoda. Malheureusement, elle est en réfection : on redore le stûpa. Il est donc enveloppé dans un entonnoir, ce qui lui donne un drôle d'aspect. Dans les rues adjacentes, les petits vendeurs ont installé leur marchandise. C'est un grandiose vide-grenier où l'on peut tout trouver ou presque. Les trottoirs sont maculés de crachats rouge-sang prenant une horrible teinte rouge-orange en séchant, car les gens chiquent du bétel. On crache de tous les côtés, même sur les murs jusqu'à une hauteur d’un mètre. Il flotte dans la rue une odeur d'encens et d'épices, la même odeur qu'en Inde. Dans ce désordre et cette crasse, les gens sont étonnamment propres. Je me demande comment ils font pour porter des vêtements aussi blancs ? Les marchands de nourriture présentent des brochettes ou des plats de riz ou de nouilles que je n'ose pas encore consommer. Il me faut quelques jours d'acclimatation avant de « me lancer ». Je sais pourtant que cette nourriture me plaît, mais pas pour l'instant. Je me sens même un peu déprimé. J'avais mes habitudes à Bangkok où, même si la vie est infernale, elle est tout de même plus confortable. J'aurais presque envie de faire demi-tour.

Je vais manger en face de mon hôtel, à une table installée sur le trottoir. On me sert du poulet et des frites avec une chope de bière à la pression. Je me régale. Aux tables voisines, des Birmans boivent du Whisky comme des cowboys avec juste un peu d'eau. Ils achètent la bouteille et ne partent que quand elle est terminée. Heureusement, ils ne sont pas agressifs et ils ne s'occupent pas des tables voisines. Ils rient comme des fous, ils ont l'alcool plutôt gai.

 

Jeudi 30 décembre 2010.

Yangon

Je change d'hôtel, pour une chambre un peu moins chère. Je vais au Daddy's Home. J'aime mieux. L'ennui, c'est que la chambre n'a pas de fenêtre. Cela présente l'avantage de ne pas avoir le bruit de la rue.

L'après-midi, je suis la rue Mahabandola, parmi les étalages en tout genre et les marchands de brochettes ou de nouilles, sur les trottoirs défoncés. Les Birmans sont aimables, toujours prêts à rire, mais le problème, c'est que je ne parle pas leur langue. J'ai beau m'exprimer en anglais, ce n'est pas pareil. Et ce sont toujours des mots thaï qui me viennent à l'esprit...

Je mange un ragoût de riz et de porc au marché Theingy zei. Je ne sais si c'est pour me faire plaisir, mais je ne suis pas plus tôt installé qu'on me met du rock local tellement fort que je n'entends plus ce que je pense. Je vais au marché Bogyoke. C'est un grand souk où les touristes trouvent leur bonheur, et le superbe objet en bois de santal qu'ils mettront en bonne place dans leur salon. Il faut dire que l'artisanat est de qualité, mais on trouve à peu près les mêmes choses qu'à Bangkok. Je ne m'attarde donc pas trop par ici.

     

Les vieilles ruelles bordées d'immeubles coloniaux seraient belles si les façades étaient rénovées. Pour l'instant, elles sont dans un tel état de décrépitude qu'on a du mal à s'y sentir bien.

     

Le soir, je vais manger un canard rôti au Golden Duck : je me régale. Cela me réconforte un peu. Allez, demain sera un autre jour. Je sais que j'aimerai la Birmanie, le voyage ne fait que commencer.

 

Vendredi 31 décembre 2010.

Yangon

    

C'est le dernier jour de l'année ! Je ne sors de l'hôtel qu'à midi. Je vais consacrer ma journée à la merveilleuse « Paya Shwedagon », la pagode au stûpa doré qui domine la ville. J'entre par la porte est, et je paye cinq dollars le droit de visite. Un Occidental arrive, avec son petit sac à dos, et il repart en colère, n'acceptant pas de payer un droit d'entrée. Le gars est un peu ridicule de se priver d'une visite qui à elle seule justifie un voyage à Yangon. Et que fait-il lorsqu'on lui demande sept dollars pour visiter le Wat Pra Kaew de Bangkok ou trois fois plus pour visiter Notre Dame de Paris... Elle est loin de nous cette époque où le Christ chassa les marchands du temple ! J'emprunte l'ascenseur, ne voulant pas monter l'escalier au milieu des marchands de « souvenirs ». Je prendrai cette voie au retour : ce sera plus facile en descendant. J'arrive sur l'esplanade de marbre où le stûpa immense, haut de cent vingt mètres et recouvert d'or s'impose et écrase le visiteur de sa beauté et de sa majesté. Il est entouré de petits sanctuaires décorés, dorés, aux rebords de toits ciselés où les fidèles vont prier. Le sol de marbre luit comme une étendue d'eau sur laquelle glissent, pieds nus, les pèlerins. C'est ici que se retrouvent les bouddhistes du monde entier. On entend parler thaï, chinois, khmer, on voit des Européens dans la position du lotus, en méditation. C'est aussi un peu la foire : de jeunes bonzes chahutent avec les filles, des touristes occidentaux se photographient mutuellement devant l'imposant stûpa... Plus loin, un nuage de fumée rend la lumière bleutée. C'est l'endroit où les croyants vont allumer leurs cierges et leurs bâtonnets d'encens. Ils sont là, agenouillés ou assis tailleur, concentrés dans leurs vœux ( je pense qu'on ne peut pas parler de prières pour les bouddhistes ). La terre pourrait chavirer, ils ne s'en rendraient même pas compte. Je tourne autour du stûpa dans le sens des aiguilles d'une montre, et au fur et à mesure que je me rapproche de la porte ouest, le monument, éclairé par le soleil, devient de plus en plus lumineux. L'or recouvrant le stûpa est estimé à plusieurs dizaines de tonnes. Il est recouvert de 13153 plaques d'or, et son socle n'est « que » plaqué or. Au sommet, près de six mille diamants et des centaines de pierres précieuses sont sertis dans la girouette et dans le petit globe au sommet duquel un gros diamant de soixante-seize carats renvoie sur le sol les rayons du soleil couchant. ( Je répète ce qu'on m'a dit, car je n'ai pas vu de mes propres yeux ). Je cherche en vain à en voir le scintillement. Pourtant, plus de deux mille carats, ça devrait éblouir !

La nuit tombe rapidement, comme toujours sous les tropiques. Le ciel passe du blanc au bleu nuit en allumant, des derniers rayons de son soleil, la Paya Shwedagon. Je m'assieds sur les marches du pavillon de la cloche, et je suis au spectacle : la lumière change de minute en minute, le ciel devient indigo, on allume les projecteurs, l'or perd ses teintes rouges pour devenir d'un jaune éclatant. Les sanctuaires s'illuminent les uns après les autres. Je vois de grandes statues de Bouddhas que je n'avais pas remarquées jusqu'alors. Leur visage laqué de blanc et l'éclat de leurs yeux de porcelaine ajoutent au mystère des lieux. Je me sens bien. J'aimerais que tout le monde parte, et que le silence ajoute au charme des lieux un côté mystique. Je me demande si un jour je ne vais pas devenir un de ces sages qui arpentent le monde avec leur petite musette.

Je descends les escaliers bordés de boutiques vendant des fleurs, de l'encens, des Bouddhas en bois, en bronze, en verre, en résine, en plastique... Tiens ! On a la chance de ne pas trouver la petite boule de verre avec la neige qui tombe lorsqu'on l'agite... Que vont bien pouvoir acheter les Bidochons ? Bah ! ils ont le choix dans une multitude d'éléphants tous plus vilains les uns que les autres...

Au bas des escaliers, je remets mes chaussures, et je reviens dans ce monde qui est le nôtre en montant dans un taxi aux suspensions tellement agonisantes que chaque trou ou bosse sur la route est un coup de pied au cul. Tout menace de tomber sur la route, les portières, le capot, les ailes, et même le chauffeur ! C'est dire que je reste vigilant... Les rétroviseurs, eux, ils sont déjà tombés. Le conducteur conduit au bruit : il commence à changer de file. Si on le klaxonne, il revient dans sa file, si rien ne se passe, c'est bon ! Et il conduit tout en me souhaitant la bonne année et en m'expliquant que ce soir il va boire de la bière avec les copains. Quand je lui dis que j'aime la « Dagon beer », il me serre chaleureusement la main : nous avons les mêmes goûts ! En passant devant la cathédrale de la Trinité, il me dit fièrement qu'il est chrétien. Quand je lui dis que moi aussi je suis catholique, il me prend presque dans ses bras. Ce n'est pas que nous allons vite, mais je lui conseille de ne pas lâcher le volant, car il pourrait lui tomber sur les genoux ! De plus, je suppose qu'au moindre accrochage, la voiture, fatiguée après tant d’années de loyaux services, se désintégrerait comme celle de Bourvil dans le film Le Corniaud.

 

Samedi 1 janvier 2011.

Yangon.

Happy New year ! Bof, ça ne devrait pas changer grand-chose de se retrouver en 2011... Hier, je n'ai pas raconté mon réveillon pour la bonne raison que je n'ai rien fait de particulier. Le soir, je me suis couché à neuf heures. Comme je me suis réveillé à dix heures trente, je suis reparti dans la rue. Les petits marchands avaient disparu laissant la place à des déchets divers maculant le trottoir. Un énorme rat noir a déguerpi juste devant mes pieds. Je n'ai pas eu peur, j'ai cru que c'était un chat. Ici, les rats et les humains font bon ménage : ils cohabitent dans les cuisines ! J'étais pratiquement seul dans la rue sinistre, noire, mal éclairée. Les bus circulaient bondés, et à chaque arrêt, les rabatteurs descendaient, hurlant les différentes directions pensant faire sortir quelque éventuel client d'un immeuble ou d'une des rares boutiques encore ouvertes. Mais où vont donc tous ces gens, et d'où sortent-ils dans cette rue déserte ! Je dois avouer que je me sentais un peu triste et seul. Il m'a suffi de penser qu'en France je n'aurais pas réveillonné et que le froid m'aurait sapé le moral, pour retrouver un peu de vigueur. Quand je suis allé me coucher, à minuit dix, je n'ai rien remarqué de particulier, sauf deux gars en longy qui se sont promenés un instant sur le trottoir en braillant « happy New year » vers les fenêtres des voisins. Si personne ne leur a jeté de seau d'eau, personne n'est apparu à la fenêtre pour leur répondre. Ici, le Nouvel An, c'est en avril, et je suppose que c'est la même foire qu'en Thaïlande où tout le monde jette de l'eau sur tout ce qui bouge !

Aujourd'hui, quand je pense à cette dernière nuit de l'année tout à fait ordinaire, je me dis que, moi qui en avais marre de « jingle bells » et du commerce thaï autour de Noël, je ne vais tout de même pas me plaindre !

Je reste dans ma chambre sans fenêtre, la porte ouverte sur le couloir, à lire et à écouter de la musique. Un Espagnol qui passait par là vient causer avec moi pendant près d'une heure. Il voyage avec une jeune et jolie Chinoise, et, contrairement à certains racontars, le fait d'être avec une Asiatique ne lui pose aucun problème. Je crois que plus je reste ici, plus je découvre qu'il y a toutes sortes de préjugés sur ce pays ou même de fausses affirmations qui ne sont qu'exagérations ou même fantasmes. J'ai déjà constaté cela à propos de la Chine. Ici, l'on pourrait croire que l'on est dans un pays où il n'y a pas de libertés. Faux ! On est dans un pays où la liberté existe, mais elle est surveillée. Bien sûr, il y a des contraintes : tout ce qui n'est pas interdit est obligatoire. Alors, il n'y a pratiquement pas de délinquance. Comme ni les cartes bancaires, ni les chèques de voyage ne sont acceptés, nous voilà contraints de transporter sur nous, l'intégralité de l'argent prévu pour notre séjour, et cela ne pose aucun problème : il n'y a pas de vols.

  

Dans l'après-midi, je vais au Castel, pour envoyer des messages Internet. C'est très énervant : le débit est lent, si lent que dès qu'on veut avoir accès à un nouveau message, il faut patienter quelques minutes. En revenant du cybercafé, je fais un détour pour aller boire une bière dans la rue, au café où je commence à être connu. Il est sept heures, la nuit vient de tomber, ils ont allumé deux énormes générateurs placés dans des cages métalliques sur le trottoir. Des clients consomment, collés à ces engins qui font un bruit d'enfer. On se croirait à la gare routière. De l'autre côté de la rue, en bas de Golden Smile G.H, la maison de thé a allumé la télé. Il y a un match de foot. Ils sont tout fiers de leur nouvel écran plasma, les clients sont nombreux sur leurs petits tabourets en plastique. Personne ne s'est soucié de régler l'écran, alors ils regardent une image prévue pour la télé 4:3 sur un écran panoramique. Tout est allongé dans la largeur, les joueurs ressemblent à des boîtes de sardines... Cela n'a aucune importance, le match semble captivant. Un peu plus loin, installées à des tables bancales, sur un trottoir défoncé, des ombres mangent des plats dont ils ne voient ni la couleur, ni la composition. Vers vingt heures trente, je reviens manger le canard au « Golden Duck ». Il n'est pas aussi bon que la dernière fois, il est dur, et, je ne sais pas pourquoi, le service, lui aussi, laisse à désirer.

Je retrouve l'Espagnol à l'hôtel : nous allons nous promener sur Mahabandoola jusqu'à la 19° rue, juste pour voir les petits restaurants du marché de nuit. La rue est barrée, envahie par les tabourets et les tables des cuisines roulantes. Il y a de tout : des poissons, des brochettes, des plats tout rouges que je n'oserais même pas essayer, des currys... Dommage, mais j'ai déjà mangé. Bizarrement, la clientèle est exclusivement masculine. Les hommes portent le longy, cette pièce de tissu de couleur sombre, semblable à une jupe qu'ils nouent sur le devant en faisant un gros nœud. Le pantalon n'est pas encore adopté par tout le monde. Il faut dire que le longy est plus adapté au climat chaud du pays. Les femmes, elles, portent une pièce de tissu de couleur plus vive ou plus claire si bon leur semble. Elles ne font pas le nœud de devant. Cela s'appelle un sarong, et c'est toujours très gracieux, car leur corps se trouve alors moulé dans cette jupe longue, et si elles ont un corps beau, ce n'est pas plus mal : on dit bien que les belles plumes font les beaux oiseaux !  

 

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