Don Det Si Phan Don

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Lundi 7 février 2011.

Don Det.

Je loue un vélo « Crocodile » à Mr Bounhome, et je pars sur la piste caillouteuse remplaçant l'ancienne voie ferrée. Trépidations et coups de pieds aux fesses, la piste est vraiment peu utilisable par ces petites bicyclettes tout juste bonnes à faire le marché dans la ville de Paksé. Je traverse le pont, jetant un coup d'œil rapide vers l'eau glauque qui descend lentement vers les petites chutes de Somphamit. On les appelle ici « Li Phi » ( pièges à esprits ), car l’esprit des personnes qui s’y noient tourne inlassablement dans ses remous. C’est pour cette raison que, à part les pêcheurs, les autochtones ne se risquent pas trop par ici. Soudain, au bout du pont, une voix sort de la petite guérite en contrebas : c'est le gardien qui m'appelle pour que je lui donne les vingt mille kips du péage. Ah voilà encore une chose qui surprend : s'ils ont des voitures avant d'avoir la route, ils ont aussi un péage avant d’avoir même pensé à construire l'autoroute ! J'explique gentiment au préposé que c’est très injuste de me faire payer puisque ce sont les Français qui ont fait cet ouvrage. Il me soutient que non, que ce sont les Laotiens. Il a peut-être raison, les Français ce devait être le casque colonial, la badine et la chemise blanche, et les Laotiens la brouette et la pelle ! Et puis d'ailleurs pour ce qui est de faire le pont, faudrait pas oublier que les Laotiens, ils sont spécialistes ! J'emprunte une route en terre très carrossable, j'ai l'impression de rouler sur du velours. Me voilà rassuré, les vingt mille kips du péage sont utilisés pour arranger la route. J'arrive près des chutes et l'on me demande une redevance de mille kips ( 0,09 € ) pour stationner ma bicyclette. Je continue donc à pied sur un sentier louvoyant entre des bambous desséchés et des buissons poussiéreux, et je m'inquiète un peu de ne pas entendre le souffle sourd de la chute. Aurait-on volé les cataractes de Somphamit ? En approchant, je découvre un spectacle de désolation : l'eau ne passe plus par-dessus les rochers gris, elle se contente de se faufiler dans un chenal étroit où elle bouillonne juste ce qu'il faut pour garder le nom de chutes. Nous sommes en pleine saison sèche, et en ce moment, seul le débit du fleuve chute. Il n'y a strictement personne, sauf un touriste acrobate perché sur un coin de falaise abrupte. Je me souviens du spectacle magistral auquel j'avais assisté ici même il y a six ans, avec des eaux bouillonnantes et des embruns formant un brouillard blanc au-dessus, mais c'était en décembre, et le Mékong faisait le gros dos.

                 

Je repars par une route de terre très roulante jusqu'au bout de l'ancienne voie ferrée, à l'endroit où une immense structure de béton servait à charger ou décharger les marchandises des sampans sur le petit train dont la locomotive rouille encore dans un coin, à quelques kilomètres. En face, le Cambodge semble désert, de l'autre côté du fleuve scintillant de milliers de vaguelettes.

 

Mardi 8 février 2011.

Don Det - Paksé.

Nous partons avec la barque de Bounhome jusqu’à Ban Nakasang. Une dizaine de buffles juchés sur un promontoire terreux nous considèrent d’un air méprisant. L’un d’entre eux s’est risqué dans la traversée d’un bras du fleuve, et il nage avec une surprenante rapidité. Seuls ses cornes et ses naseaux affleurent la surface. Il reprendra « pied » sur une plage sablonneuse parmi les buissons, et il y restera couché, une bonne partie de la journée en compagnie des hérons et des aigrettes.

Nous quittons Ban Nakasang dans un car confortable, climatisé. Fini les trajets en camionnette, coincés parmi les paniers de bambou émincé qui nous écorchaient les jambes, parmi les sacs de poissons dont le jus laissait une odeur tenace sur nos chaussures. Fini les conversations avec les paysans du coin qui voulaient tout savoir, de notre âge à l’âge de nos enfants, de ce pays si loin, la France dont ils ne connaissaient plus que la Tour Eiffel. Finis les éclats de rire ou les discussions entre gens du coin qui colportaient les nouvelles du secteur. Maintenant, nous sommes sagement assis à notre place, il y a un écran plasma et le chauffeur a même la possibilité de nous passer le dernier spectacle comique de leur émission télévisée préférée. Et les Laotiens alors ? Hé bien eux, ils continuent à raconter leurs histoires dans les camionnettes surchargées, mais il n’y a plus aucun touriste, car nous, les nantis, on nous impose le voyage confortable bien que beaucoup plus cher. Et quand on a le choix, on préfère payer et rester dans notre ghetto occidental. C’est un peu comme du temps de la colonisation : il y a un progrès, mais cela ne concerne pas tout le monde !

Le soir, à Paksé, je mange un bon plat de canard rôti, et lorsque j’ai terminé, une femme un peu limitée intellectuellement, rôdant dans le coin avec un sac en plastique dans lequel elle a fourré toute sa « richesse », me demande de lui laisser manger le reste de mes frites et de l’assiette de légumes frits. Elle ne veut pas des quelques morceaux de canard que je lui propose. Les mendiants auraient-ils les moyens d’être végétariens ?

 

Mercredi 9 février 2011

Paksé - Surin.

Nous montons dans le car de huit heures trente vers Chong Mek, la frontière thaïlandaise. Le passage vers la Thaïlande se fait très rapidement, et nous revoilà dans le car jusqu’à la gare routière de Ubon. Là, il ne nous faut attendre qu’une demi-heure pour partir vers Surin. Mais il y a un tout petit problème : la climatisation a rendu l’âme. Il fait une chaleur insoutenable, et les passagers thaïlandais ne veulent pas voyager dans ces conditions. En effet, l’air est irrespirable, nous dégoulinons de sueur au bout de deux minutes, car nous n’avons pas la possibilité d’ouvrir les fenêtres. Le car ne va pas bien loin, en face de la gare routière, un autre véhicule attend, en plein soleil. Alors évidemment, avant que la chaleur intérieure comparable à celle d’un four ne tombe, nous avons tout loisir de nous sentir mal ! Nous arrivons à Surin à quatre heures et demie, très fatigués, assoiffés et affamés. Je suis comme un robot mal programmé : j’ai l’air conditionné. Il me faut deux soupes en suivant à la terrasse d’un petit restaurant de la gare routière pour me sentir mieux.

Je réserve ma place dans le train couchettes de demain, et nous allons à Koko, chez Amnoay en tuk-tuk. Pour sortir de la ville, dans le quartier du marché, il y a un bouchon, le premier que je vois à Surin. Il y a encore une dizaine d’années, il n’y avait ici que des cyclopousses et de rares voitures... C’est bon signe, la ville évolue ! Je suis rassuré !

 

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Dernière modification:  22/11/2012