Samedi 14 novembre 2015
Lube
- Francfort
Il fait
presque un temps estival... L'automne n'a certainement pas voulu se
manifester avant notre départ... comme pour nous prouver que, nous qui
allons vers le soleil et la chaleur, nous ferions mieux de rester dans
notre Béarn pour finir de cueillir les tomates et les piments.
Hier
soir, un horrible massacre a eu lieu dans Paris : on parle de cent
trente victimes, de nombreux blessés de plusieurs fusillades dans six
endroits différents. Les fanatiques islamistes ont réussi à nous faire
prendre conscience que nous sommes en guerre.
Aline M.
nous conduit à la gare. Il n'y a pas de contrôle particulier avant de
monter dans le train où nous ne sommes vraiment pas nombreux. Amnoay
avait préparé tout un tas « d'en-cas », et nous passons le voyage à
manger du poulet, du canard laqué, du fromage, des yaourts... nous avons
même du vin de Taron. Il nous manque l'apéritif et le café. Quand on
part en voyage régulièrement, on devient de plus en plus prévoyant, on
finit par ne plus partir à l'aventure. On y perd un peu en supprimant
tous ces imprévus qui sont l'essence même du voyage, mais l'on y gagne
en confort, et ce n'est pas négligeable !
À
Toulouse, nous avons juste le temps de traverser entre la gare de chemin
de fer et la gare routière, et la navette de l'aéroport démarre.
À
dix-neuf heures, avant de monter dans l'avion de Francfort, les
contrôles de police ne sont pas plus draconiens que d'habitude et nous
ne sentons aucune inquiétude parmi les passagers.
Pendant
le voyage, on a droit à un succulent sandwich au fromage et jambon, à
une bière fraîche, et la compagnie Lufthansa parvient presque à faire
concurrence au « menu Amnoay » de midi.
Nous
arrivons à Francfort à vingt heures trente, et dans l'aéroport, nous
nous trompons de couloir. Nous devons récupérer nos bagages, car notre
escale dure plus de vingt-quatre heures. Nous nous perdons dans le
labyrinthe des couloirs de cet énorme aéroport. Tant pis pour la
discipline et la rigueur allemande : nous prenons un couloir interdit au
public et réservé au personnel, et nous nous retrouvons dans la salle de
livraison des bagages. Et c'est alors que commence le jeu de piste : il
nous faut retrouver l'hôtel où nous avons réservé une chambre. Pour
cela, il nous faut prendre la navette jusqu'au terminal 2, un joli petit
train sans conducteur, tout automatique. Là, il nous faut trouver la
porte 8. Heureusement, mes connaissances en allemand, bien que
rudimentaires, nous tirent d'affaire, car je sais dire : « je ne
comprends pas et ne parle pas allemand » ! Malgré toutes ces
difficultés, nous arrivons tout de même à l'hôtel Meininger non loin de
l'aéroport. La chambre est confortable, je trouve une chaîne belge sur
la télé, et nous avons droit en boucle aux infos sur le massacre de
Paris. Les journalistes belges ne sont pas mieux que les français, ils
n'attendent pas de savoir si leurs sources sont fiables, ce qui compte,
c'est de lancer la nouvelle la plus racoleuse, quitte à la démentir
demain. Ils interrogent certaines personnes qui prétendent ne rien
savoir, et d'autres qui ne savent rien, mais qui disent tout ! Il est
neuf heures et demie et nous ne voulons pas partir au lit sans dîner,
alors nous avons encore une fois droit au « menu Amnoay », le même que
dans le train.
Dimanche 15 novembre 2015
Frankfurt - Bangkok
Déjeuner : canard laqué, poulet... le « menu Amnoay », dès neuf heures.
Nous devons libérer la chambre à onze heures, donc nous revoilà dans la
navette jusqu'à l'aéroport dans lequel nous allons devoir passer dix
heures. Il y a du mouvement, des gens qui vont et qui viennent, et je
m'amuse d’après leur physionomie, à deviner d'où ils viennent. Quant aux
touristes trimbalant leur sac à dos, j'essaye de deviner, à voir leur
tenue, vers où ils vont ! Amnoay ne veut pas aller manger une pizza ou
un schnitzel dans un des nombreux points restauration, alors elle sort
de son sac le poulet, le canard laqué... le « menu-Amnoay », pour la
énième et dernière fois. Le contrôle des bagages à main est effectué
dans une ambiance conviviale, car tous les passagers en toute conscience
en sentent l'utilité.
Nous
décollons à 21 h 00. L'avion
est un Boeing 747. Nous avons de la place, car il n'y a, dans tout
l’avion, qu'un seul siège vacant et il est juste à côté d'Amnoay. Le
repas est délicieux comme au restaurant, presque aussi bien que le
« menu d'Amnoay ». Pour passer le temps, nous avons le choix entre une
bonne vingtaine de films et je jette mon dévolu sur « Winnie L'ourson »,
un dessin animé de Walt Disney. C'est très bien quand on n'a pas envie
de réfléchir, et puis je pense que ça m'aide un peu à m'endormir.
Lundi
16 novembre 2015.
Bangkok.
Je me
suis réveillé en cours de voyage, et j'ai vu alors sur le GPS que nous
survolions la région sud de Kabul, en Afghanistan, c'est-à-dire que nous
sommes en plein au-dessus du Pachtounistan, fief des Talibans. J'ai eu
un peu de mal à me rendormir, car je sentais qu'en bas, il y avait des
jumelles braquées sur nous.
Quand
l'avion entame sa descente à l’approche de Bangkok, nous laissons
au-dessus de nous, de majestueux cumulus éclatants sur un fond de ciel
d'azur, pour nous rapprocher d'un patchwork vert, jaune ou brun dans
lequel de petits étangs renvoient le soleil. De gros bourgs formés de
petits pavillons tous identiques sont disséminés dans ce vert paysage,
prouvant bien qu'Alphonse Allais avait raison quand il prétendait qu'il
fallait construire les villes à la campagne. Et nous descendons et nous
commençons à voir les embouteillages sur les autoroutes rectilignes,
nous distinguons nettement les canaux scintillants, puis encore de
petits pavillons aux toits rouges, et nous sommes maintenant si près
qu'il me semble qu'on pourrait bien les décoiffer si la piste
n'apparaissait pas soudainement sous l'énorme aile de l'avion. Le pilote
nous fait prendre contact avec le sol avec une douceur remarquable,
comme si nous étions sur du velours. Je regrette que la coutume
d'applaudir un atterrissage en douceur se soit perdue. Je trouvais
sympathique de manifester sa joie d'arriver et de plus avec le sourire !
Grâce à
Amnoay, je peux passer au contrôle pour les Thaïlandais où il y a
nettement moins de monde ! Le policier me lance, avec un sourire
moqueur : « Vous avez coupé votre moustache » ! C'est vrai qu'il sait
tout grâce à la petite caméra placée devant moi qui prend un cliché à
chaque fois que je passe à un point frontière... Et en mars et avril
dernier, j'étais moustachu. On ne peut plus rien leur cacher !
Nous
prenons le train aérien jusqu'à Makassang au milieu des immeubles puis
nous montons dans un taxi qui se retrouve aussitôt englué dans la
circulation démente de cette fin d'après-midi. Amnoay raconte au
chauffeur qu'elle cultive son jardin et fait des soupes pour les amis,
et moi, je me gèle ; je suis frigorifié à cause de la climatisation
poussée à l’extrême. Les Thaïlandais ne savent rien faire avec mesure !
Arrivés à l'hôtel S6 ( soi 6 de Sukhumvit ) quand nous descendons du
taxi, nous avons l'impression de prendre un bain de vapeur. Il a plu ce
matin et il fait une chaleur caniculaire en ce moment. Les flaques d'eau
ne sèchent même pas tant l'air est humide.
Le soir,
nous allons dîner au Suda du soi 14. À la carte, nous avons le choix
entre cent-trente-cinq plats. Je ne sais pas, en cuisine, comment ils
s’y retrouvent ! Ce restaurant n'a pas changé depuis trente-six ans que
je le connais. La patronne, elle, elle s'est un peu fripée, mais elle
est toujours aussi leste pour courir de table en table pour faire les
additions des clients.
le métro aérien |
le métro souterrain |
Mardi
17 et mercredi 18 novembre 2015.
Bangkok.
Chaleur
de trente degrés dans la chambre d'hôtel puisque nous ne prenons pas de
chambre climatisée. C'est parfois un peu désagréable, mais nous évitons
ces bronchites qui terrassent bon nombre de touristes, et nous trouvons
qu'il fait presque frais quand nous arrivons dans la rue. Entre le
marché de nuit sur l'avenue Sukhumvit et les grands magasins, nous
trouvons tout ce que nous cherchons sans la moindre difficulté. Il y a
vraiment de tout à Bangkok !
Dans
cette ville à l’urbanisme tout à fait anarchique, c’est l’heure de
pointe perpétuelle ! Ne cherchons pas à quelle heure on peut rouler en
évitant les embouteillages : ils sont continus. Ce qui est surprenant
aussi, c’est l’intensive circulation nocturne. Mais où vont et d’où
viennent ces automobilistes et ces cyclomotoristes qui sillonnent les
avenues à trois heures du matin ? Dans la moiteur nocturne, on entend
toujours le ronflement des grosses cylindrées qui redémarrent aux feux
verts, et la pétarade agressive des touk-touk, ces petits
taxis-triporteurs.
Pour
aller d’un « soi » ( ruelle, et on prononce « soï » ) à un autre soi, il
faut presque obligatoirement emprunter la grande avenue, car la plupart
de ces « soi » se perdent dans des labyrinthes inextricables. À part
quelques échoppes de soupes et quelques petites épiceries, on ne trouve
aucun commerce dans ces ruelles bordées de hauts murs derrière lesquels
se cachent des villas ou des résidences cossues. On peut même découvrir
soudain une petite jungle fermée par des palissades de tôles rouillées.
Aussi, quand le quartier est inondé, on peut rencontrer un superbe cobra
nageant gracieusement dans l’eau trouble au-dessus du trottoir. J’en ai
trouvé un, un jour, semant la panique sur l’avenue Sukhumvit, et
personne n’aurait osé le tuer, car dans les croyances thaïlandaises, le
serpent est un animal sacré. Les riverains armés de longs bambous ou de
manches à balai faisaient en sorte qu’il n’aille pas chez eux, le
chassant vers le magasin du voisin.
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