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Lundi 14 février 2011.

Bangkok - ( frontière du Cambodge ) – Siem Reap.

Il vient d’y avoir une période de troubles entre le Cambodge et la Thaïlande, à propos d’un différend au sujet de la frontière entre les deux pays non loin de Sisaket. Il faut dire qu’à cet endroit, se trouve un temple khmer assez intéressant : le Vat Phra Vihan. Jusqu’à présent, on ne pouvait le visiter qu’à partir de la Thaïlande, et les Thaïs empochaient la somme correspondant au droit d’entrée. Maintenant, les Cambodgiens ont fait une route de leur côté, et cela complique les choses. Le tracé de la frontière a été fixé unilatéralement par les Français, dans les dernières années de la colonisation. Depuis, l’ONU a reconnu le tracé actuel, mais les Thaïs le contestent. Il faut dire qu’en ce moment, en Thaïlande, la situation est plutôt instable. Les « chemises rouges » attendent le moment opportun pour remettre le feu aux poudres, le peuple commence sérieusement à douter de ce gouvernement militaire qui ne propose pas les élections promises depuis leur prise de pouvoir illégitime... Alors, un peu comme le pensait Bush juste avant la deuxième intervention militaire en Irak : une bonne petite guerre est un bon exutoire à l’ennui de la population. Alors à la télé thaïlandaise, on voit en boucle les habitants des villages frontaliers déplacés « par sécurité », des militaires exhibant des morceaux de bombes tombées sur une maison... On est en droit de se demander si ce ne sont pas les militaires thaïs eux-mêmes qui ont monté tout ce scénario une fois les témoins civils éloignés. Et puis hier, on apprenait que les soldats cambodgiens avaient battu en retraite devant les forces supérieures de l’armée thaïlandaise. On nous montrait des civils heureux de retrouver leur lopin de terre et leur village, des soldats la larme à l’œil, avec des bébés dans les bras, des gens interviewés récitant ou lisant sur un panneau se trouvant devant eux ce que l’armée a envie d’entendre dire. Avec toute cette mise en scène, les militaires espèrent sans doute rassurer les Thaïlandais. Quel que soit le gouvernement au pouvoir, le problème du Vat Phra Vihan ressurgit quand il faut montrer au peuple que les personnes qui dirigent le pays ont « de la poigne ». Je pense que le subterfuge commence à devenir de moins en moins crédible.

Je vais à la station d'Ekamai en taxi, à huit heures. Il n'y a pas grand monde. Mon bus part dans dix minutes. Les deux cent cinquante kilomètres de bonne route ne sont pas trop pénibles jusqu'à Poipet, et le voyage ne me semble pas trop long. J'arrive en forme, et heureusement, car au grand marché de la frontière, c'est le chaos. Des portefaix, le regard vide, trimbalent d'énormes baluchons, d'autres, réduits à l'état de bêtes de somme, tirent de lourdes charrettes de bois, équipées de roues de voitures et chargées à craquer. Ces gens-là sont si maigres qu'ils ne transpirent même pas. Ce sont des Cambodgiens traversant la frontière pour convoyer des marchandises qui continueront leur voyage dans un camion thaïlandais. Ils vont et viennent, se croisent, se suivent, tirant leur fardeau. Des enfants, quand ils sont trop petits pour porter, poussent derrière les voitures. Il y a, dans notre monde, une catégorie de gens qui sont nés sous une mauvaise étoile ou tout simplement sous une mauvaise latitude ! Je suis à peine descendu du bus qu'un essaim de chauffeurs de touk-touk m'assaille. Le prix de la course est exagéré, mais ils savent qu'on n'a pas le choix, car on veut passer la frontière le plus vite possible. Je fais faire mon visa en quelques minutes. Je comprends pourquoi plus personne ne se donne la peine d'aller dans les ambassades : c'est si simple et si rapide ici ! Là aussi, au lieu des 1200 bahts, les employés veulent 1500, puis 1400, finalement, je donne 1220, car il faut faire un geste pour ne pas que le gars perde la face. Le poste de police thaï est franchi en deux minutes. L'employée n'a sans doute jamais su que son pays est appelé le « pays du sourire », ou alors, elle est triste de me voir partir, mais bon sang qu'elle a l'air sinistre ! Je marche en plein soleil parmi les charrettes surchargées et les colis amoncelés sur le trottoir. J'arrive au poste de police cambodgien et me place à la fin de la file d'attente comme il se doit. Nous avançons millimètre par millimètre, en plein soleil, et je commence à avoir « le casque » qui bout. En plus, comme pour rendre la chose encore plus désagréable, il y a devant moi, un jeune Allemand style boy-scout qui me donne des coups avec sa guitare à chaque fois qu'il bouge. Je ne dis rien, mais j'ai du mal à réfréner une grande envie de lui plier sa guitare en huit pour qu'il puisse la caser dans la petite poche latérale de son sac à dos. Et on attend, et on avance lentement, et il fait horriblement chaud sous le soleil. Les fonctionnaires de police, eux, ils s'en moquent, ils sont dans leur aquarium climatisé. Quand j'en ai terminé avec les formalités policières, il me faut attendre le bus, pendant une bonne demi-heure. Parmi les touristes attendant le bus, certains ont des piercings, d'autres des cheveux tressés comme des cordages de chanvre, d'autres des gueules à consommer du chanvre, et certaines jeunes filles plutôt belles se sont enlaidies en arborant des tatouages qu'elles auront honte de montrer quand elles seront un peu plus âgées. Ce genre de petits bourgeois qui se déguisent en zonards ne me plaisent guère. Je n'aimais pas beaucoup les beatniks que je rencontrais à Kaboul ou en Inde dans les années soixante-dix, mais ils avaient un avantage sur ces « illuminés » d'aujourd'hui : ils communiquaient, échangeaient les bonnes adresses, et il y avait une incontestable complicité entre les voyageurs. Aujourd'hui, on ne parle à l'autre que lorsqu'on a besoin, et si l'on cherche à lier connaissance avec quelque voyageur, on est soupçonné de mauvaises intentions. Alors, c'est de plus en plus le voyage « individuel » au vrai sens du terme. Chacun-pour-soi ! Le bus climatisé est confortable, la route est bonne, et nous filons à 90 km/h. Nous pourrions arriver à Siem Reap avant la nuit ce qui est toujours un avantage, mais nous nous arrêtons à 53 km de Siem Reap pour manger dans un restaurant. Il est cinq heures, personne n'a envie de manger, mais comme une commission sera reversée au chauffeur ou à la compagnie... Et puis, c'est mieux si nous arrivons à Siem Reap avec la nuit, on pourra ainsi nous proposer l'hôtel adjacent à l’arrêt de bus qui, lui aussi, reversera une commission. Toutes ces petites supercheries, au bout de la journée, ça finit par fatiguer. Aussi, quand je me retrouve au « Family G.H » que personne ne m'a forcé à choisir, je me sens bien. Juste le temps de prendre une douche, et je repars dans la moiteur de la ville pour retrouver Ginette et Rolland, les Canadiens avec qui j'avais passé quelques jours en Birmanie. Ils sont un peu fatigués, eux aussi, alors nous décidons d'un rendez-vous pour demain. Je dîne au « Barrio », restaurant tenu par Patrick, un Français implanté ici depuis longtemps. Je mange du pâté de campagne fait maison et un steak aux oignons confits... On croit rêver non ?  

 

Mardi 15 février 2011.

Siem Reap.

J'ai bien dormi, et je me réveille un peu assommé. J'étais si fatigué, hier, que j'ai dormi avec le short et les chaussettes, en travers du lit, un peu comme si je m'étais littéralement effondré. Le petit-déjeuner proposé sur le prix de la chambre n'est pas terrible : un café et du pain de mie grillé avec de la confiture... Il manque un fruit et les œufs frits. Je vais au marché. La ville a terriblement changé en six ans, le marché est un peu plus propre, mais l'odeur est toujours aussi forte, surtout dans le quartier des vendeuses de poisson. Comme les touristes sont devenus de plus en plus nombreux, les produits susceptibles de les intéresser sont aussi plus nombreux. Ainsi, l'on trouve des allées entières où les commerçants vendent tous les mêmes fausses soies ou les mêmes Bouddhas en métal argenté. On peut même trouver des sculptures sur faux bois. La supercherie est géniale : on prend un morceau de vieux bois, un peu pourri et vermoulu, et on colle le visage moulé dans de la résine du Bouddha. L'illusion est parfaite : le touriste pense avoir acheté une belle sculpture en beau bois d'arbre, alors que ce n'est qu'un beau bobard ! Vers midi, je retrouve les amis canadiens. Nous allons manger dans un restaurant local, une de ces petites échoppes ouvertes sur la rue où les plats sont toujours appétissants pour un prix relativement abordable.

     

L'après-midi, nous prenons une « brouette », ce tuk-tuk où l'on s'installe dans une remorque attelée à l'arrière de la moto, et nous allons au bord du lac Tonlé Sap. Rien ne laisse deviner qu'il y a ici un lac durant six mois de l'année, si ce n’est les pilotis hauts de plus de cinq mètres sur lesquels sont juchées les maisons. Le lac est parti au loin, si loin qu'on ne le voit plus, même en montant les marches de l'escalier menant au Phnom Krom. À la place du lac, il y a des rizières. Quand l'eau reviendra, les paysans deviendront pêcheurs. Varin, le chauffeur du touk-touk, s'arrête à une fabrique de « nuoc-mân », ce jus de poisson faisandé qui agrémente tous les plats. De petits poissons déjà à demi pourris sont déchargés de la benne d'un camion à grands coups de pelle. Ils sont déversés sur le sol en ciment, mélangés avec un gros sel jaunâtre et jetés dans une fausse où ils vont continuer à pourrir. Tout est sale : le sol, les cuves, la benne du camion... et pourtant, le produit sera en bonne place sur les tables de restaurants. En Occident, nous sommes un peu ridicules avec notre souci de l'hygiène poussé à l'extrême !

Le soir, avec Ginette et Rolland, nous mangeons dans le même petit restaurant cambodgien, et nous nous offrons du vin de Bordeaux acheté au supermarché voisin.

 

Mercredi 16 février 2011.

Siem Reap.

Mes copains canadiens sont partis à Battambang, et moi, je décide, bien que j'y sois déjà allé deux fois, de revenir sur le site d'Angkor. Je retrouve Varin, le chauffeur de touk-touk, et à huit heures, nous voilà en route vers le site magique d'Angkor Vat. Sur la route, à la sortie de la ville, nous sommes arrêtés par une barrière rouge et blanche comme on en trouve aux passages à niveau. Je suis un peu intrigué, car la voie transversale est trop étroite pour laisser passer une voiture, un train encore moins, d'autant plus qu'il n'y a pas de rails. Que vois-je traverser ? j'ai du mal à le croire... Un brancard sur des roulettes, poussé par un infirmier en blouse blanche. Et sur le brancard, un enfant allongé avec le flacon de sérum qui se balance au-dessus de lui. Le pauvre petit essaye de lever la tête pour voir où il se trouve, certainement intrigué de passer d’un couloir d’hôpital à une route où pétaradent des motos. Nous sommes devant l’hôpital pour enfants, entre les deux ailes du bâtiment qui, heureusement, s’agrandit et se modernise. Le médecin qui a créé cet établissement œuvre à ce que tous les soins soient gratuits pour les enfants ou les femmes venant ici pour accoucher. Il sacrifie toute sa vie pour mener à bien son œuvre. Il y a encore des gens bien dans notre monde ! Par contre, les promoteurs, gros rapaces sans foi ni loi, s’opposaient à l’extension de l’hôpital.

Je paye mon droit d’entrée de vingt dollars ( il n’a pas augmenté depuis de nombreuses années ) et on me remet une carte avec ma photo dessus en quelques minutes.

     

Je commence la visite par le grand temple d’Angkor Wat. Il est neuf heures et les grands bus de touristes arrivent un à un. Il commence à faire chaud... Je regrette de n’être pas venu ici au lever du jour à six heures. La longue allée de pierre permettant de traverser les douves commence à se peupler de gens armés de caméras, coiffés de toutes sortes de chapeaux. Ils se photographient devant le temple, même s’il est en partie couvert de grandes bâches vertes et hérissé d’échafaudages. Peu importe que la photo soit belle, ce qui compte c’est que l’on puisse dire « j’y étais ». Les Chinois braillent, ont toujours l’air de se disputer, les Japonais aboient et photographient n’importe quoi, les Européens écoutent sagement le guide, et clic ! clac ! tout le monde immortalise ces moments inoubliables. Quand ils reviendront chez eux, ils monteront leurs albums photo à des amis indifférents... J’ai entendu dire un jour que le paradis est un endroit où tout le monde se raconte sa vie, l’enfer c’est la même chose, sauf que chacun apporte ses diapos !

     

Le grand temple d’Angkor Wat est envahi par les touristes, entouré d’une herbe desséchée jaune et poussiéreuse, mais il garde sa noblesse et sa beauté. Bien sûr, je l’ai déjà visité à la saison des pluies et ce site est beaucoup plus beau lorsqu’il est mouillé, lorsque la pierre, noire ou rouge, transpire et que les plantes alentour envahissent les lieux. Les mousses redeviennent vertes, les murailles perdent leur ton monochrome.

Les sculptures d’Apsaras ornant les murs sont devenues luisantes à force de caresses, leurs seins brillent, et leur ventre légèrement bombé semble de verre. Le visiteur touche à tout, pénètre dans les endroits interdits, car il suppose que c’est là que se trouvent les merveilles tant attendues. Tous les visiteurs ont déjà entendu dire le plus grand bien d’Angkor Wat, il n’y a pas de raison d’être déçu ! Pour accéder au coeur du sanctuaire, les escaliers de pierre étaient trop dangereux pour les octogénaires venant ici, alors on les a condamnés et l’on a placé une échelle de meunier aux marches de bois de cocotier, un peu plus accessible.

Je fuis, car même dans la galerie pourtournante où l’histoire des Rois est contée dans une bande dessinée infiniment longue sculptée dans la pierre, les visiteurs se font si nombreux qu’il faut tous tourner dans le même sens. Je vais au Bayon. Alors là, on se croirait en pleines fêtes de Bayonne. Il ne manque que les « bandas », mais la foule y est ! et ce sont les Italiens qui mènent le bal. Ils sont venus en groupes et ils s’interpellent, s’extasient, se congratulent... Les Japonais traînent toujours un pied photo plus grand qu’eux, avec un appareil aussi gros qu’un autocuiseur... les Chinois, ils grimpent partout et ils jacassent. Au-dessus de cette vulgarité, les têtes de pierre au nez camus et aux grosses lèvres pulpeuses observent, leur face grise tournée vers cette volaille qu’elles considèrent avec un sourire énigmatique. Il est bien loin ce temps où un frôlement dans une galerie me laissait prévoir une rencontre avec un enfant venu ici dans l’espoir de vendre un lance-pierres ou un petit collier de perles de verre. Il est révolu le temps du silence. Pas plus qu’Angkor Wat le Bayon ne me séduit. Je n’arrive même plus à m’intéresser aux superbes bas-reliefs qui ornent les murailles de la galerie extérieure. Je suis pris entre un guide anglophone qui explique à un groupe de pèlerins anglo-saxons la vie du temps des rois et un guide italien qui pour être mieux entendu de ses sept ou huit clients n’a pas hésité à se munir d’un porte-voix. Pas bien le Bayon, je traverse une partie de la forêt où des racines énormes digèrent lentement des murs de pierres de latérite rouge. La ville antique, la belle Angkor digérée par la jungle, ses temples grignotés encore aujourd’hui par les grands arbres disparaîtra-t-elle un jour ? Il n’en restera que ce que l’homme aura jugé bon de sauver. Je passe devant le Baphuon. Cette énorme pyramide fut, dès le XI° siècle, un temple hindouiste dédié à Shiva et Vishnou. Une transformation du XV° siècle en fit un temple bouddhiste. On utilisa des pierres de grès récupérées dans la partie hindouiste, pour édifier un gigantesque Bouddha couché, incorporé au sanctuaire. Au début du XX° siècle, les Français décidèrent de sauver ce temple qui s’est malgré tout peu à peu effondré, on l’a parfois soigné, souvent sans résultat, et à chaque fois, une guerre est venue entraver le travail des archéologues, comme si le destin s’acharnait à vouloir faire disparaître le monument. Des archéologues l’avaient « démonté » pierre par pierre et avaient numéroté celles-ci pour pouvoir, une fois les fondations reconstruites en béton reconstituer le Baphuon, mais voilà que la sinistre période Khmer rouge est venue interrompre leurs travaux. Les archéologues ont dû partir, laissant le site entre les mains des barbares iconoclastes... Chacun espérait que les dérisoires protections contre l’érosion des pluies éviteraient au site de subir des dégâts supplémentaires, mais ce qu’ils ne savaient pas, c’est que les Khmers rouges allaient brûler comme de vulgaires paperasses tous les plans, et des plans en trois dimensions, sur lesquels la place de chaque pierre était mentionnée avec précision. Une fois la barbarie vaincue et les Khmers rouges dispersés, les archéologues français se sont retrouvés devant un immense puzzle dont le modèle avait disparu. Que faire de ces étendues de 300 000 pierres numérotées quand on ne savait plus où les placer ? L’homme étant doué d’une persévérance incommensurable, ils sont arrivés à retrouver pratiquement la place de chaque pierre.

     

Je vais à la terrasse des éléphants, et si les bas-reliefs existent toujours, ils sont victimes de leur succès... photographiés chaque seconde par une nuée de petits gnomes ridiculement chapeautés. Les éléphants ne semblent pas s’en soucier, mais les têtes de Dieux ou de monstres semblent grimacer en souhaitant un peu plus de tranquillité.

Je mange avec Varin dans un restaurant sur le site. Fini la soupe de nouilles dont on se demandait s’il était bien raisonnable et bien prudent de la consommer tant les ustensiles de cuisine étaient douteux, on nous donne une carte où l’on a le choix entre des steak-frites et des soupes au gingembre et à la citronnelle. Il y a quelques années, on prenait un repas juste pour reprendre des forces avant de continuer à visiter les lieux, aujourd’hui le déjeuner fait partie des plaisirs de la journée.

    

Nous suivons une route ombragée jusqu’au Ta Phrom. Je pensais retrouver là le calme et la sérénité des visites précédentes. Je suis encore plus déçu que partout ailleurs. Le site a été très endommagé faute d’entretien sérieux pendant ces dix dernières années, alors on a étayé les édifices avec de gros tubes en fer. Les herbes qui cohabitaient avec les grosses pierres tombées des édifices en ruine ont disparu. On a mis des planchers sur les sentiers pour ne pas que les visiteurs salissent leurs belles chaussures, et le comble, c’est qu’on a placé des estrades devant les endroits les plus beaux pour que les touristes puissent se photographier. Le Ta Phrom a perdu son âme, encore plus que le reste du site. Angkor a été méthodiquement pillé depuis le XIX° siècle, aujourd’hui, on met tout en œuvre pour le dénaturer. J’ai bien fait d’y revenir, ainsi je sais maintenant que je n’ai plus envie d’y retourner !

 

 Jeudi 17 février 2011.

Siem Reap - Bangkok.

J'ai acheté mon billet de bus à une agence qui doit envoyer un touk-touk me chercher au « Family G.H » à sept heures et demie. Je descends dans le hall, et je trouve trois Français attendant eux aussi. Nous prenons le temps de causer. Ils sont du sud-est de la France, mais l'un d'entre eux connaît bien la région de Pau, car sa grand'mère habite Morlaàs. Voyez comme le monde est petit ! Nous causons, le temps passe, le touk-touk n'arrive pas... Je vais à l'agence, et je m'aperçois qu'on m'a un peu oublié. Alors que je reviens à l'hôtel, les compatriotes partent justement avec un touk-touk. Ils ne sont pas avec la même compagnie que moi, et à eux aussi on les avait oubliés... Quelques instants plus tard, on vient me chercher à moi aussi. Le chauffeur de touk-touk va d'abord à un grand hôtel, on lui signale que le bus vient de partir et qu'il doit se trouver à un autre endroit de Siem Reap. Nous voilà sillonnant les rues à huit heures du matin, et nous finissons par retrouver le bus. Il ne reste que ma place de libre, nous démarrons aussitôt. Après une heure de route, nous nous arrêtons pour le petit-déjeuner, et je retrouve les Français. Ils sont installés sur des tabourets en plastique placés dans la travée. Les trois heures de route vont leur sembler longues ! À seize kilomètres de Poi Pet, nous nous arrêtons dans une gare routière toute neuve, perdue en pleine nature. Pourquoi ? Nul ne le sait. Personne ne veut manger, personne n'a besoin d'aller aux toilettes et tout le monde aimerait arriver à la frontière le plus vite possible. En voyant le chauffeur s'attabler devant une grosse assiettée de riz, je comprends bien que lorsqu'il s'arrête, il est censé amener une clientèle, alors on lui offre le repas... même si les passagers ne dépensent pas un seul dollar. Et nous attendons ainsi une bonne demi-heure. À la frontière, c'est toujours le même désordre. Du côté cambodgien, nous passons relativement vite, mais c'est du côté thaïlandais qu'il nous faut faire preuve de patience. L'attente dure plus d'une heure, dehors, en pleine chaleur, sous un passage couvert d'un toit de tôle, puis, lorsqu'on nous autorise à y pénétrer, dans la salle climatisée où les fonctionnaires de police nous enregistrent sur l'ordinateur, mettent en mémoire notre beau faciès grâce à une caméra... On ne nous donne qu'un visa de quinze jours. C'est une des nombreuses absurdités de ce gouvernement fantoche. Le tourisme est en baisse dans le pays, et on ne délivre plus de visa de trente jours gratuit si l'on entre par voie terrestre. C’est une façon détournée de dire aux touristes « Circulez, ya rien à voir ! »

Je n'ai que le temps de manger une soupe, et le bus démarre. Ici, les transports en commun sont toujours prêts, comme s'ils n'attendaient que nous.  

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Dernière modification:  22/11/2012