Dimanche 7 janvier 2018.
Chon Mék – Paksé 46 km.
Ce matin, je me lève avant le soleil, car je
veux passer la frontière pendant que c’est encore calme, alors que les
cars ne sont pas encore là. Le douanier laotien en voyant mon passeport,
s’exclame pour faire rire les gens en pensant que je ne vais pas
comprendre : « Celui-ci, vu le nombre de visas, il doit avoir une
maîtresse (mia noy) au Laos ! » Mais c’est moi qui fais rire tout
le monde en lui répondant : « Non, je suis tout seul et tout triste ! »
La route est bonne jusqu’à Paksé, avec quelques animaux flegmatiques qui
traversent : chiens, vaches, cochons, poulets, canards. C’est dimanche
matin, la plupart des gens ne travaillent pas, alors on fait du
nettoyage, et on brûle les poubelles devant sa porte, au bord de la
route. Je suffoque dans une odeur d’herbe et de plastique brûlé, et par
moments, j’ai du mal à retrouver ma respiration, car c’est ainsi à
chaque maison pendant plus de vingt kilomètres. Il va peut-être falloir
un jour que tous les pays riches qui produisent sans se soucier de ce
que deviennent les déchets dans les pays pauvres s’unissent pour les
aider à recycler et à incinérer. L’ensemble de tous les pays du Sud-est
asiatique pollue bien plus que toutes les centrales au charbon des USA !
Je me rends directement à l’hôtel « Nang Noy » où j’ai réservé
une chambre dans laquelle je passe tout l’après-midi tant il fait chaud
et humide dehors ! Paksé se réveille un peu plus chaque année : la ville
devient agitée, bruyante, on arrange les berges du
Mékong pour les
rendre aussi agréables qu’à Vientiane…
Lundi 08 janvier
2018.
Paksé
Aujourd’hui, c’est comme au Tour de France : Jour de Repos ! Et pour me
reposer, je suis très fort ! Je mets donc toute mon énergie à me vautrer
sur mon lit, sous le ventilateur qui brasse l’air tout doucement, dans
une chambre très agréable. L’après-midi, j’ai décidé de laver mon vélo
et de nettoyer la chaîne et les dérailleurs. Alors, je vais au marché
pour acheter une petite brosse comme une brosse à ongles : introuvable !
Je me contente d’une brosse un peu plus grande. C’est comme ça ici, on
ne trouve pas souvent ce qu’on veut, mais il y a toujours quelque chose
qui y ressemble !
Mardi 09 janvier
2018.
Paksé – Chong Mek. 47 km.
Je
pensais partir avec le lever du jour, puis je ne quitte « Nang Noy
G-H » qu’à huit heures, après avoir pris le temps de prendre
deux œufs sur le plat avec du pain bien frais. La route, c’est la même
qu’à l’aller, mais dans l’autre sens, avec la fumée des poubelles en
moins et un peu de chaleur en plus ! Il y a des camions thaïs tractant
des remorques qui vont très vite, des camions laotiens poussifs,
transportant de la terre, qui ont presque du mal à me doubler, et toute
une flopée de petits tracteurs, sortes de motoculteurs attelés à une
remorque qui vont moins vite que moi. Les petites vaches aux têtes de
biches, traînant leur licou, broutent une herbe toute desséchée sur le
bord, et elles traversent sans coup férir quand l’envie leur en prend.
On y est habitué, c’est la tradition. Il est dix heures trente quand
j’approche de la frontière, le soleil est presque à la verticale la
route monte en faux plat, et je n’ai pas d’air pour me rafraîchir. Je
dois avoir le thermostat un peu détraqué, car j’ai la sensation d’être
carrément rôti. Quand j’arrive au poste frontière laotien, je commence
par m’asseoir dans un coin à l’ombre et je vide mon bidon. Soudain, que
vois-je par une porte qui vient de s’ouvrir ? Un réfrigérateur avec
plein de boissons fraîches derrière la vitre : des jus d’orange, du
Coca, de la limonade… et surtout des bouteilles d’eau avec de la buée
dessus ! Je demande à une douanière (on dit com’ça maintenant !) si je
peux acheter une bouteille d’eau, elle me répond sans même me regarder
« bomi » ; ça veut dire il n’y en a pas ! Elle ne fait pas
ça par méchanceté, elle ne m’a simplement pas regardé, car si m’avait
vu, avec ma tronche de langouste bouillie, elle aurait certainement eu
pitié. Bah ! peu importe : je donne mon passeport on le tamponne, on me
le rend aussitôt et je reprends mon vélo jusqu’à la frontière
thaïlandaise à une centaine de mètres. Le douanier me demande d’où je
viens, où je vais ; à première vue, il aime bien les cyclistes. Quand
j’arrive à l’hôtel, je me jette sous la douche froide, et en cinq
minutes, je retrouve ma vitalité et même, me semble-t-il, mon
intelligence.
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